Source : L'Humanité.fr - 22 août 2012
Fin réjouissante de vacances avec le nouveau film de Pascal Thomas, à déguster en salle comme on lit un roman sur le sable de la plage. Grincheux et grognons s’abstenir.
Associés
contre le crime…
de Pascal Thomas
France, 1 h 44.
Certains, qu’on ne blâmera pas, prennent plaisir de retour chez eux à quitter leurs souliers de ville pour enfiler une vieille paire de charentaises. Vous savez, celle qui baîlle un peu, a subi les avanies du temps et dont le chien s’est servi pour affûter ses canines. C’est un peu cette sensation de confort que l’on éprouve en se glissant dans la salle de cinéma pour y découvrir ce nouveau volet des aventures de Prudence et Bélisaire Beresford. On trouve encore à la production la société Les Films Français, qui n’est autre que celle fondée un jour par Pascal Thomas. La photo est de Renan Pollès, qui éclairait déjà le maître en 1978 dans Confidences pour confidences et n’a guère cessé depuis. Le fidèle Hubert Watrinet est toujours directeur de production. Quant au style, il continue de privilégier la ligne claire et le son à l’ancienne, comprendre avec les haut-parleurs derrière l’écran, dans le refus des ambiances latérales si en vogue aujourd’hui, en particulier dans les superproductions riches en effets spéciaux. Bien entendu, comme dans les films à personnages récurrents quand cela est possible, les rôles sont suivis. Pour s’en tenir aux têtes d’affiche, c’est bien André Dussollier qui incarne Bélisaire Beresford, le détective retraité roi de l’évasion porté sur la bouteille, tandis que son épouse Prudence, confiante dans l’action et la jugeote à hauteur de son flair, qui s’affiche féminisant, et tout autant portée sur la bouteille à ses moments perdus (qui sont nombreux), est encore jouée par Catherine Frot, Bernard Verley étant une nouvelle fois le général ou Alexandre Lafaurie le valet Hector. Faut-il ajouter que l’intrigue est, pour la troisième fois consécutive, tirée d’Agatha Christie, mais d’un texte moins connu qu’à l’accoutumée, The Case of the Lissing Lady, dans le recueil Partners in Crime, déjà porté à l’écran en 1984 dans une version télévisée aussi obscure que très différente du film qui nous est proposé aujourd’hui par Pascal Thomas.
De ce décalage vient sans doute la différence entre cet opus et les deux qui l’ont précédé. Nous avons abandonné, au moins partiellement, la recherche raisonnée, le décryptage d’indices, dans la tradition incarnée par Hercule Poirot ou Miss Marple. Les petites cellules grises ont laissé la place à une part de folie croissante. On ne cherche pas outre mesure, bien que les décors soient les mêmes, à nous faire croire à cette histoire de sérum permettant d’atteindre à l’éternelle jeunesse et donc à la réalité de cette mystérieuse comtesse russe disparue. La fantaisie, au sens renoirien, la loufoquerie suppléent.
Jean Roy