Source : France Inter - 28 avril 2022
Sarah Biasini avait quatre ans et demi quand sa mère, Romy Schneider, a disparu. La comédienne a publié il y a peu un livre dans lequel elle s'adresse à sa propre fille pour lui raconter le vertige d'être devenue mère quand on a à peine connu la sienne.
Sarah Biasini est comédienne. Après des débuts à la télévision, puis quelques apparitions sur grand écran, c'est surtout à la scène qu'elle se consacre. Elle a joué Feydeau, Shakespeare, Strindberg et est à l'affiche depuis le début de l'année de "Un Visiteur Inattendu", à l'Artistic Théatre, une pièce policière signée Agatha Christie.
Vincent Josse l'a rencontrée pour le "Grand Atelier fantôme" qu'il vient de consacrer à Romy Schneider.
"Je jongle avec le souvenir que le public a d'elle et mon intérêt unique pour la mère". Avec le temps Sarah Biasini a appris à voir l'actrice, à voir le travail : "Avant, je ne cherchais que la mère. Or, c'était très difficile de trouver la mère dans les films".
La mère, c'est dans le récit familial que Sarah Biasini l'a trouvée, et dans les nombreux témoignages de ses proches : "Ma famille n'a eu de cesse de me tourner vers le côté solaire de ma mère. Ils ont bien insisté sur le fait qu'ils l'ont vue heureuse et allant chercher des plaisirs très simples comme des déjeuners du dimanche, des bonnes bouffes, des réunions de famille, des anniversaires, des Noël, des vacances partagées avec les uns et les autres."
Parmi les nombreuses scènes marquantes jouées par Romy Schneider, il y a celle tragique de la comédienne dans "L'important c'est d'aimer" de Zulawski.
Cette scène multi rediffusée ou l'actrice est au sommet de son art, Sarah Biasini a aujourd'hui encore beaucoup de mal à la regarder : "Il ne faut pas oublier que je n'ai aucune objectivité, je reste sa fille de quatre ans et demi qui regarde les gens fascinés en train de voir ma mère pleurer. Et moi, je trouve ça d'une perversion et d'un voyeurisme malsain." Aujourd'hui la jeune femme salue le travail de la comédienne : "parce qu'effectivement, elle est bouleversante dans cette scène-là et dans toutes les autres, parce qu'elle est incroyablement honnête et sincère. Elle a un jeu d'une pureté extraordinaire."
Parmi les film qu'elle regarde avec grand plaisir, il y a "César et Rosalie", "une vraie madeleine", confie-t-elle, et les films de Sautet : "C'était aussi très intéressant pour moi de voir ces films-là parce que ça parle de son époque. Elle était vraiment très ancrée dans son époque, c'était une femme de son temps."
Elle le raconte dans son livre, "La beauté du ciel" (Stock) : quelques unes des rencontres qu'elle a pu faire ont été chargées en émotion - avec Piccoli notamment : "Moi, je pleure, j'arrive pas à m'en empêcher. Et lui aussi est très ému. Et je ne sais plus ce qu'on se dit tellement c'est émouvant, tellement c'est fort."
Aujourd'hui Sarah Biasini le reconnait, si elle a choisi ce métier, c'est aussi, un peu pour retrouver d'une certaine manière ce qu'a pu vivre sa mère. Et si elle est aujourd'hui une comédienne à part entière, Romy n'est jamais loin : "Elle sera toujours sur mon épaule. Et encore plus en choisissant ce métier-là. Mais je la sens à peine, j'aimerais bien la sentir un peu plus. Moi je chercherai éternellement la mère et personne ne me la donnera. Je n'en aurai jamais assez. Je l'ai accepté ça."
Anne Audigier
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