Source : France Inter - 28 avril 2022
Romy Schneider écrivait. Beaucoup. Notamment sur les tournages. Tous les réalisateurs qui ont travaillé avec elle en témoignent. Certains ont gardé ces précieux trésors.
Une exposition à la Cinémathèque, un beau livre qui sortira en octobre… Romy Schneider inspire toujours autant. Clémentine Deroudille, la commissaire de l'exposition et rétrospective dédiée à Romy Schneider à la Cinémathèque et Jean-Pierre Lavoignat, qui lui consacre donc un livre, ont évoqué la comédienne dans "Le Grand Atelier fantôme" que lui a consacré Vincent Josse.
Parmi les objets et autres souvenirs à découvrir dans l'exposition : les petits mots de Romy. Des notes, des télégrammes, quelques lignes griffonnées sur une note de service. Ces petits mots qu'elle n'a jamais cessé d'envoyer aux réalisateurs avec lesquels elle travaillait. "C'était à la fois des réactions spontanées", explique Jean-Pierre Lavoignat "du genre "tu m'as pas assez regardé pendant la scène". C'était parfois des extraits de livres. Le fils de Claude Sautet, qui a tout gardé, m'a montré des lettres de Romy Schneider, où elle recopie des pages de Freud ou des pages de Goethe pour les partager parce que ça correspond à des sentiments ou à des émotions."
Dans cette masse de documents, un échange de télégramme juste avant le tournage de "César et Rosalie". Septembre 1971 : Romy Schneider est au Mexique où elle tourne "L'assassinat de Trotski" avec Alain Delon. Sautet travaille lui sur son prochain film "César et Rosalie". Il a proposé le rôle de Rosalie à Catherine Deneuve qui, d'abord enthousiaste, a laissé un peu traîner les choses. Sautet racontera plus tard que lui aussi a laissé trainer les choses parce qu'il voulait Romy.
Jean-Pierre Lavoignat raconte : "Sautet lui envoie un télégramme sur le tournage en lui proposant "César et Rosalie", et Romy lui répond : "Je sais que madame Deneuve l'a refusée. Je serai ta Rosalie, mais je ne suis pas Rosalie."
Un télégramme dans lequel il y a des fautes, Romy Schneider ne maîtrisant pas totalement le français écrit : "Elle a appris le français de manière quasi-phonétique," rappelle Jean-Pierre Lavoignat "donc dans toutes les lettres, même dans les dernières années qu'elle écrit, il y a des fautes d'orthographe qui rendent la chose encore plus touchante et sincère."
On peut aussi parler d'une feuille de service de "Max et les ferrailleurs", où Romy Schneider avec un crayon à maquillage gras a écrit : "Mon Clo, tu diras au producteur et au directeur de production que je ne viendrais pas au dîner ce soir, puisque ni les machinos, ni les électros n'ont été invités".
Tavernier, avec lequel elle a tourné "La mort en direct", racontait que sur les tournages, elle signait tout ces petits mots du nom de son personnage.
Costa-Gavras, qui a dirigé Romy Schneider dans "Clair de Femme", adapté du roman de Romain Gary, se souvient également de ces petits mots : "Le soir, quand on se séparait, elle me faisait des petits mots. Le matin, quand elle arrivait, elle me faisait des petits mots." Un jour Costa lui dit qu'ils peuvent en parler, qu'elle n'est pas obligé d'écrire. La réponse de Romy fuse : "Il faut écrire parce que parler, ça s'envole, ça s'en va. Écrire, ça reste". "Je pense qu'il fallait qu'elle dise ses angoisses," explique le réalisateur, "des angoisses qu'on ne peut avoir que quand on est acteurs et actrices. Les vrais grands acteurs réfléchissent à chaque moment. À chaque moment, il faut rentrer dans le personnage. Il faut être le personnage. Sinon, le public n'y croit pas."
Anne Audigier
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