Source : Ecran Noir - 08 juin 2011
Déporté. Résistant. Communiste. ministre sous un gouvernement socialiste. Espagnol. Français membre de l'Académie Goncourt. Engagé toujours. Citoyen à jamais. Ecrivain sur le tard (mais quel écrivain!). Dramaturge. Biographe (on lui doit un document magnifique sur son ami Yves Montand). Jorge Semprun était tout cela à la fois. Né à Madrid 13 ans avant de devoir s'exiler pour cause de Franco, son ennemi. Mort à Paris ce mardi soir.
C'était aussi un homme de cinéma. L'ami de Montand certes, mais aussi celui de Costa-Gavras.
Il a d'abord collaboré, en 1966, avec Pierre Schoendoerffer, écrivain et cinéaste : "Objectif : 500 millions", avec Bruno Cremer. La même année, il écrit le scénario du film d'Alain Resnais, "La guerre est finie", avec Yves Montand et Genviève Bujold. semprun est cité pour l'Oscar du meilleur scénario. le film remporte le Prix Louis-Delluc.
En 1969, il signe "Z" pour Costa-Gavras, avec Montand, Irene Papas et Jean-Louis Trintignant. Toujours des films politiques, s'insurgeant contre les dictatures. Deuxième nomination à l'Oscar du meilleur scénario. Le film récolte l'Oscar du meilleur film étranger et deux prix à Cannes. L'année suivante il signe l'adaptation de "L'aveu", toujours de Costa-Gavras, encore avec Montand, et aussi Simone Signoret.
"L'attentat" en 1972, avec Trintignant, Jean Seberg et Michel Piccoli, marque ses début,s avec le réalisateur Yves Boisset. Là encore, la rébellion, l'insurrection, l'actualité post-coloniale inspirent celui dont le parcours et la création ne font qu'un.
Il réalise un documentaire en 1974, Les deux mémoires. Cannes sélectionne "Stavisky", d'Alain Resnais, avec Jean-Paul Belmondo. Huées qui seront réparées cette année avec une Palme d'or pour l'acteur. Charles Boyer recevra le prix d'interprétation masculine au festival. Le film n'est d'ailleurs pas raté et reste l'un des plus gros succès du cinéaste.
Costa-Gavras le réengage pour "Section spéciale", en 1975, avec Michael Lonsdale et Louis Seigner. Cannes encore, avec un prix de la mise en scène.Semprun écrira ensuite "Une femme à sa fenêtre" (avec Romy Schneider et Philippe Noiret), "Les routes du Sud", de Joseph Losey (avec Montand et Miou-Miou) ou encore "K", d'Alexandre Arcady (avec Patrick Bruel et Marhe Keller).
Un seul de ses livres sera porté à l'écran, par Jacques Deray : "Netchaiev est de retour", incarné par Vincent Lindon, en compagnie d'Yves Montand, dont ce sera l'avant-dernier film.
Semprun a été membre du jury du festival de Cannes en 1984. Jamais sa ferveur et son espoir de voir un monde plus humaniste ne l'avaient quittés, malgré les déchirures du siècle qu'il a subies et les blessures qu'il n'a pas pu panser. Il laisse des scénarios d'une grande intelligence, non dénué d'action et de tension humaine. Des histoires universelles qui reflétaient nos civilisations destructrices, et les forces qui s'y opposent.
Par Vincy