Près de 30 après sa disparition, personne n’a oublié la plus française des actrices germaniques. Une frimousse d’ange, des rôles mythiques, que ce soit dans "Sissi" ou "La Piscine"… le parcours de Romy Schneider est digne d’un roman. L’exposition qui lui est consacrée à Berlin jusque fin mai revient sur sa vie marquée par la gloire mais aussi par des tragédies, à l’image de certains de ses personnages.
Photos, lettres, affiches de films, vidéos, costumes… Le Musée du Cinéma et de la Télévision de Berlin fait revivre l’icône de toute une génération à travers l’exposition «Romy Schneider. Wien-Berlin-Paris». Divisée en cinq parties, la rétrospective reprend une par une les différentes périodes de la carrière et de la vie de l’actrice en présentant sur 450 m2 des archives exceptionnelles, dont une grande partie de documents privés. Ainsi, on découvre d’abord la jeune Romy, révélée dans le rôle de l’impératrice Sissi, puis son ascension dans le cinéma international, avant qu’elle ne soit érigée en star mondiale adulée de tous. Enfin, on suit son déclin personnel alors que sa carrière est à son apogée. D’autre part, une annexe de l’exposition est entièrement consacrée à l’impératrice Elizabeth, en présentant les costumes portés par Romy Schneider lors des tournages, et en retraçant sa vie tourmentée, tout comme celle de son interprète.
Princesse malgré elle
Née Rosemarie Magdalena Albach le 23 septembre 1938 à Vienne, Romy est la fille de deux acteurs, l’Allemande Magda Schneider et l’Autrichien Wolf Albach-Retty. Elle grandit à Berchtesgaden, dans les Alpes bavaroises, à vingt kilomètres du nid d’aigle d’Hitler. C’est là qu’elle suit sa scolarité jusqu’en 1953, avant d’entrer à l’Ecole des Beaux-arts de Cologne. Douée en dessin et en peinture, elle ambitionne de devenir créatrice de mode ou dessinatrice.
A la même époque, le producteur Kurt Ulrich recherche une jeune fille pour son film "Lilas blancs". Romy décroche le rôle, et donne ainsi la réplique à sa propre mère, l’actrice Magda Schneider. Le succès du film est immédiat, tout comme celui de Romy qui obtient dès lors de nombreuses propositions, et qui prend définitivement le pseudonyme de Romy Schneider. Elle connaît la consécration deux ans plus tard en interprétant l’impératrice "Sissi" dans l’œuvre éponyme d’Ernst Marischka. Le triomphe du film en Allemagne et en Autriche est tel que deux suites sont tournées en 1956 et 1957. Cependant, Romy a de plus en plus de mal à s’identifier à ce personnage et aux contraintes qui lui sont imposées.
En 1958, elle se libère du carcan de sa mère Magda, qui gérait la jeune carrière de sa fille d’une main de fer – elle l’avait notamment empêchée de signer un contrat que lui proposait Kirk Douglas en 1957. En effet, elle décide de choisir dorénavant elle-même ses rôles, et accepte d’incarner le personnage principal de "Christine", de Pierre Gaspard-Huit. C’est sur ce tournage qu’elle rencontre Alain Delon, étoile montante du cinéma français. Ils se fiancent en mars 1959 devant la presse internationale, tandis que Romy quitte l’Allemagne pour s’installer à Paris.
De Sissi à la star internationale
Alors que Delon accède au rang de star en France, Romy, elle, doit y faire ses preuves. Néanmoins, Luchino Visconti lui donne en 1961 la chance de jouer aux côtés de son fiancé dans la pièce "Dommage qu’elle soit une putain" au Théâtre de Paris. Puis elle commence à tourner dans des films aussi bien français, qu’anglais ou encore américains. Cette période marque un véritable tournant dans sa carrière. De la jeune héroïne typique allemande, jeune et tumultueuse, elle s’oriente vers des rôles plus sombres et complexes, comme dans Le Procès d’Orson Welles en 1962. Celui-ci lui vaut non seulement l’Etoile de cristal de l’Académie du Cinéma, mais elle se voit aussi offrir un contrat de sept ans par la Columbia. Romy part donc s’installer temporairement aux Etats-Unis où elle tourne notamment avec Otto Preminger et Terence Young.
L’actrice, lauréate en 1964 de la Victoire du Cinéma français, qui récompense la meilleure actrice étrangère, revient en Europe après qu’Alain Delon l’ait quittée. L’année suivante, elle rencontre Harry Meyen, acteur et metteur en scène berlinois. Leur fils David naît en décembre 1966. Sa carrière française prend un véritable envol en 1968 avec "La Piscine", film de Jacques Deray pour lequel le couple Schneider/Delon est reformé. Romy rencontre un an plus tard le cinéaste Claude Sautet, qui devient avec Visconti le réalisateur le plus important dans sa carrière, et avec qui elle tournera cinq films.
Après son retour à Paris en 1970, elle tourne pour Claude Chabrol ("Les Innocents aux mains sales"), Robert Enrico ("Le vieux Fusil") ou encore Jean-Claude Brialy ("Un amour de pluie"), tout en restant fidèle à Claude Sautet ("César et Rosalie", "Mado"). A la même époque, elle divorce de son mari et prend la garde de son fils. Romy atteint le sommet de sa gloire en 1976, alors qu’elle décroche le premier César de la meilleure actrice pour son interprétation de Nadine dans "L’important c’est d’aimer" d’Andrzej Zulawski. Le film et l’actrice remportent un immense succès, tant public que critique.
Un ange en enfer
En apparence, la comédienne adulée par le public mène une vie de conte de fées. D’ailleurs, en 1977, sa fille Sarah naît de son union avec Daniel Biasini, épousé deux ans plus tôt. Mais derrière cela se trame en réalité une descente en enfer dont elle ne se sortira jamais. Ironie du sort ou prémonition, ses rôles au cinéma sont ceux de femmes confrontées à la mort, à la tourmente et à la dépression. Ainsi, on retrouve dans le personnage de "Mado" son addiction à l’alcool et aux médicaments; dans "La Mort en direct" de Bertrand Tavernier, on voit une femme mourante filmée à son insu, tandis que Romy est harcelée par les photographes ; enfin, "Clair de Femme" de Costa-Gavras met en scène la mort d’une enfant, allusion troublante à celle de son fils David, le 5 juillet 1981.
Cet événement tragique va d’ailleurs sonner comme sa propre mort. L’actrice, qui perd son fils de 14 ans, ne parvient pas à surmonter cette épreuve et s’enferme dans la dépression et les médicaments. Elle tourne son dernier film quelques mois plus tard, "La Passante du Sans-Souci", sous la direction de Jacques Rouffio. Il s’agit là de bien plus que d’une interprétation, puisque Romy exprime toute sa détresse à travers son personnage. Une détresse qui aura raison d’elle, puisque le 29 mai 1982, son compagnon Laurent Pétin la découvre sans vie dans leur appartement parisien. Cependant, aucune autopsie n’étant pratiquée, les réelles causes de son décès restent indéterminées, même si des complications cardiaques ou encore une consommation d’alcool conjuguée à celle de médicaments sont évoquées.
En pensant à Romy Schneider, on se souvient forcément de ce destin tragique. Mais elle fut avant tout, comme le disent les réalisateurs qui l’ont dirigée, une «actrice professionnelle», reconnue par le public et les critiques, distinguée par deux César. En 2008, un César lui a été remis à titre posthume à l’occasion de ce qui aurait été son 70ème anniversaire. L’occasion pour Alain Delon, venu chercher le trophée, de demander une ovation en son honneur. Morte à 43 ans, Romy n’avait-elle pas écrit à Claude Sautet – la lettre est présente dans l’exposition : «Peut-être que je ne serai jamais vieille» ? Elle n’est peut-être pas morte «vieille», mais son influence opère toujours. Ainsi, un prix porte son nom – le prix Romy Schneider, qui récompense un espoir féminin du cinéma français, tandis qu’elle reste un modèle à suivre pour toute une génération de comédiennes.
Texte et photos : Elodie Fersing
Romy Schneider. Wien – Berlin – Paris, à la Deutsche Kinemathek, Museum für Film und Fernsehen (Potsdamer Strasse 2), jusqu’au 30 mai 2010.
Tarifs : adultes 4€; réduit 3€
www.deutsche-kinemathek.de
C'est un bel article. Ce serait vraiment bien que l'expo devienne itinérante et vienne en France. J'aimerais beaucoup visiter cette expo et voir des objets qui lui ont appartenus (d'ailleurs il me semble que Sarah a prêté un des "Cesar" de Romy pour l'expo) En plus le tarif est très attractif.
Rédigé par : fab | 08 février 2010 à 16h46
J'espère pouvoir aller à Berlin... Mais ce n'est pas encore fait...
Rédigé par : Inoubliable Romy (The big chef d'ici...) | 08 février 2010 à 19h54
Quelle chance ! Tu nous raconteras alors ?
Rédigé par : fab | 09 février 2010 à 16h13
Bien sûr !
C'est pas fait, hein...
Rédigé par : Inoubliable Romy (The big chef d'ici...) | 09 février 2010 à 19h40