Source : Le Dauphiné.com - 08 décembre 2009
Si vous souhaitez savoir ce qu'il s'est réellement passé entre Serge Bromberg et Inès Clouzot, quand leur ascenseur est tombé en panne, rendez-vous ce soir, à Lux scène nationale de Valence. Le réalisateur du documentaire "L'enfer de Henri-Georges Clouzot" sera en effet présent dans la Drôme pour une rencontre-débat avec le public après la projection, et ce moment-là, déclencheur de ce travail, sera un de ceux qu'il confiera au public valentinois.
Une légende à la hauteur de la réalité
«Faire un film, dit-il, c'est toujours un moyen d'exprimer en 90 minutes, une, deux ou trois histoires... Là, il y en avait tellement autour de l'Enfer que je n'ai pas voulu ajouter la mienne, comme je n'ai pas voulu parler de la vie de Clouzot, ni des problèmes d'assurances qui ont suivi l'arrêt du tournage, ni de la version de 1994 de Chabrol».
Il faut dire que ce film de 1964, que Clouzot a commencé mais jamais terminé, est une des légendes du cinéma français. Pour Serge Bromberg qui a passé sa vie à rechercher et restaurer des films anciens, ces pellicules constituaient un véritable rêve. «Tout le monde attendait ce film, à l'époque c'était le plus gros budget, et personne n'a jamais eu accès aux images...» Ces séquences, même lui ne savait pas trop qu'en penser. «Après 40 ans d'obscurité, il y avait autour de ce film une bulle de légendes absolument démente ! J'étais convaincu qu'elles allaient être décevantes, voire médiocres... Mais quand je les ai vues, alors j?ai compris qu'elles étaient aussi belles que la légende !»
Ces essais tournés entre le 6 et le 26 juillet 1964 nous montrent des acteurs transcendés par les jeux de lumières, de sons, de couleurs inventées par Clouzot pour donner formes aux fantasmes de son héros Marcel (Reggiani), en proie à de véritables hallucinations causées par sa jalousie maladive à l'égard de sa jeune épouse Odette (Romy Schneider).
«Tout l'objet de mon film a été d'essayer de comprendre ce que cherchait à faire Clouzot et ce qu'il s'est passé (...)» Comment ce projet jamais abouti, a dépassé son auteur. Comme son personnage, Clouzot est dévoré par l'objet de son obsession, jusqu'à en perdre son acteur principal, puis plus tard la santé.
Car si le tournage s'arrête brutalement, c'est parce que le réalisateur de "Quai des Orfèvres" ou du "salaire de la peur" va être victime d'un infarctus. «Il y a 15 jours j'ai rencontré la fille d'un des 3 chefs opérateurs qui travaillaient sur L'enfer. Elle m'a raconté qu'enfant, elle était venue sur le tournage voir son père et que la première chose qu'elle a pensé alors c'était "il faut que je parte le plus vite possible"... Quant à Romy Schneider, Costa-Gavras m'a confié qu'elle refusait de parler de quoi que ce soit même des années plus tard».
Enfin, ajoute Serge Bromberg, savoir si oui ou non le film de Clouzot aurait été une réussite une fois terminé demeure aussi vain que de savoir si Odette a trompé Marcel...
REPÈRES PRATIQUES : L'ENFER D'HENRI-GEORGES CLOUZOT.
Un documentaire de Serge Bromberg et Ruxandra Medrea.
Avec Romy Schneider, Serge Reggiani, Bérénice Béjo et Jacques Gamblin.
Rencontre avec le réalisateur ce soir à Lux, Valence, à 20 h 30.
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