Secrets de famille
Deux sœurs et un frère dans une bulle du temps : un moment isolé, dans la maison même où ils ont passé leur enfance et ils ont le loisir de reconsidérer, comme malgré eux, leurs relations et leur vie. Car la personne qui fait office de lien et de mémoire, le père, a été hospitalisé et n’a plus sa tête. Le frère n’a jamais été très actif et entreprend le dialogue avec une sœur compréhensive qui a suivi la voie classique du mariage et de la maternité et l’autre sœur, plus fermée et plus femme d’affaires. La palabre grince et se libère. Ils parlent d’ «organiser l’avenir» mais c’est le passé qui leur saute à la gorge. Car ils découvrent qu’ils n’ont pas tous la même connaissance de la vie familiale – des aventures de leur père, surtout - et que les fragments de vérité que chacun possède se contredisent ou révèlent à l’un ou à l’autre des secrets bien cachés.
Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ?, disait la chanson de Ray Ventura qu’ils écoutaient enfants. Qu’est-ce qu’on attend pour brasser la vie à pleines mains et en finir avec nos petites prudences ? S’interroge Salomé Lelouch. C’est une première pièce, un peu timide, mais séduisante par sa modestie même. La comédienne Salomé Lelouch, qui ne joue pas dans son spectacle, a un vrai don d’écrivain. Les mots sont justes, la soirée frémit à cuisson douce, avec des rebonds, des surprises, des blessures, des griffures. Cette joliesse caustique se retrouve dans l’interprétation de Sarah Biasini, au charme songeur, Rachel Arditi, en lignes brisées, et de Benjamin Bellecour, en pâte feuilletée. On y entend la rumeur de la vie comme dans les spirales d’un coquillage.
Qu’est-ce qu’on attend ? de Salomé Lelouch, mise en scène de l’auteur, avec Rachel Arditi, Sarah Biasini et Benjamin Bellecour. Ciné 13 Théâtre, tél. : 01 42 54 15 12. (1 h 20).
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