L’amour à la mer : l’adolescence, l’amour, l’amitié
Le virus cartésien de nos distributeurs va plus loin. Si l’on comprend encore –à la rigueur– qu’ils aient peur de l’insolite, on ne voit pas du tout pourquoi ils veulent fausser la carrière de films poétiques, en les jetant dans un circuit tape-à-l’œil où ils risquent de n’être entendus qu’à moitié. C’est le cas notamment du premier long métrage de Guy Gilles, «L’amour à la mer», qui sera présenté bientôt dans le cadre du Club des Avant-Première (dont nous publions régulièrement le programme). Du même Guy Gilles, j’avais signalé cet un court-métrage enchanteur et frais «Au biseau des baisers», que les hasards de la programmation avait bêtement relégué dans quelque salle de Clichy. Cette fois-ci, il serait regrettable que «L’amour à la mer» soit annexé par un circuit de la Rive Droite, alors que sa place est de l’autre côté de la Seine, à «La Pagode» ou au «Studio Saint-Séverin», là où il y a entre l’œuvre et le public cette merveilleuse complicité qui appelle la sympathie.
De quoi nous parle Guy Gilles, en effet ? De lui-même, de son adolescence, de ce qu’il ressent devant la vie, l’amour, l’amitié, l’art ou Paris, enfin de tout ce qui nous appartient comme à lui ; en d’autres termes, de nous-même.
«L’amour à la mer», ce n’est rien d’autre qu’un regard jeté vers ce que l’on croit être beau et digne d’être vécu ou ressenti. Ce cinéma-là ne repose ni sur une histoire, ni sur le «suspense» : on s’y installe, on s’y comptait, on revient volontiers à ses 17 ans, un peu comme dans «Bande à part» (encore un de ces films dont la petite musique ne convenait pas au caractère – choc du «Publicis»). Saura-t-on maintenant épargner au film de Guy Gilles ce genre d’erreur d’aiguillage qui menace si souvent les jeunes réalisateurs français ?
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