Source : La Montagne - 18 avril 2021
Avec "La beauté du ciel", Sarah Biasini livre un roman révélant ce lien indestructible d'une fille pour sa mère Romy Schneider. L'occasion aussi de s'adresser à sa propre fille. Une belle histoire de famille loin des paillettes et plus près du coeur.
Pensez-vous que votre mère est au ciel en train de jouer une suite des Choses de la vie, film de Claude Sautet ?
Sarah Biasini : Je ne sais pas mais, avec ce livre, je trouvais intéressant de montrer comment les enfants perçoivent les choses. Ils mettent plus de poésie que les adultes dans les contextes difficiles à comprendre, tels que la mort. Souvent, je me suis dit en regardant le ciel : "Tiens, elle est derrière un nuage !" Je savais très bien que ce n'était pas vrai, mais je trouvais l'image magnifique.
Le déclic de votre ouvrage a été à la fois la profanation de la tombe de votre mère et le fait de tomber enceinte quelques semaines plus tard. Pourquoi avoir attendu ces événements pour écrire ?
Sarah Biasini : J'avais envie d'écrire depuis un moment mais je ne savais pas que j'allais écrire ce livre là. Pour être tout à fait honnête, je sentais que le sujet maternel pouvait m'inspirer. L'affaire de la profanation de la tombe de ma mère et puis mon début de grossesse étaient tellement romanesques. Ne pas en parler à travers mon histoire personnelle aurait été bien regrettable.
Mais vous allez au delà d'un simple hasard, comme si un signe divin vous avez guidé ?
Sarah Biasini : Je peux très bien me dire que ces événements sont le pur fruit du hasard mais c'est aussi joli d'y mettre un peu de poésie. Et d'y voir un lien. Étant en pleine réflexion d'un projet de roman, cette occasion était une belle opportunité.
La réalité a dépassé la fiction...
Sarah Biasini : Totalement. En général, la réalité dépasse toujours la fiction.
En préambule, vous citez une chanson de Jacques Higelin : "La mort est le berceau de la vie". Que voulez-vous dire ?
Sarah Biasini : C'est d'abord une chanson très belle. Cela veut dire que la nature a horreur du vide et que les deux, vie et mort, vont ensemble. Elles dansent ensemble. Comme une idée d'infini, avec ce signe de boucles enlacées.Être devenue mère à votre tour semble vous avoir rapproché de votre propre mère, la rendant plus vivante que jamais. Sans doute. C'était une occasion de m'interroger sur mon rapport de mère avec sa fille.
Elle est partie alors que vous n'aviez que 4 ans. Pourtant, vous vous en rappelez comme si c'était hier...
Sarah Biasini : Je me souviens bien lorsque mon père me l'a dit. A ce moment précis, j'ai compris que la chose était grave, irréversible. Que c'était la fin de quelque chose, le début d'une autre vie. Je l'ai intégré mais je voulais pas m'y attarder. Quand on est enfant, on sent la gravité de la situation mais on veut continuer d'être dans le mouvement. Après cette annonce, j'ai, sans doute, continué de jouer.
Vous auriez une question à lui poser, ce serait laquelle ?
Sarah Biasini : Je ne vous répondrai pas. C'est une bonne question mais elle est tellement intime. De plus, il y a des choses que l'on écrit dans un livre mais qu'on ne dit pas à haute voix.
Vous écrivez que, contrairement aux clichés, votre mère n'était pas uniquement cette comédienne jouant des rôles dramatiques.
Sarah Biasini : D'une façon générale, une personne n'est pas faite que de larmes ou de rires. C'est un mélange des deux. Mon livre s'appuie aussi sur une volonté de normaliser certaines choses. Parler d'abord de la mère. Je me fiche de la star. Je n'ai pas fait un livre sur le cinéma, mais sur l'amour maternel. Sur mon ressenti d'enfant et à la manière dont j'allais expliquer tout ça à ma propre fille, elle-même une enfant.
Que répondriez-vous à votre fille si elle vous demandait : "C'était qui Romy Schneider ?"
Sarah Biasini : D'abord, elle ne me dirait pas qui était Romy Schneider mais "c'était qui ma grand-mère ?" A partir delà, je lui montrerais des films, des photos, je lui parlerais.
Êtes parfois un peu lasse qu'on présente comme "la fille de..." ? Cela m'enorgueillit suffisamment, c'est très bien.
Sarah Biasini : Revenez-vous parfois sur sa tombe ? Je n'aime pas y aller. Les gens qu'on aime sont toujours avec nous. Partout.
Olivier Bohin
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