Source : 20 minutes.fr - 13 juin 2018
Plus de trente ans après sa mort, Romy Schneider continue de fasciner. "Trois jours à Quiberon", qui sort ce mercredi en salles, en est un nouvel exemple. A partir d’une interview donnée par la comédienne en 1981, la cinéaste franco-iranienne Emily Atef brosse le portrait d’une femme libre mais malheureuse et en proie à ses démons.
A l’occasion de la sortie de ce film, en compétition au dernier Festival de Berlin, le journaliste Bernard Pascuito, auteur de "La Dernière Vie de Romy Schneider" (Ed. du Rocher), nous explique pourquoi, tant d’années après sa mort, cette icône du cinéma fait toujours parler d’elle.
Pourquoi vous êtes-vous intéressé à Romy Schneider ?
La réalisatrice de "Trois jours à Quiberon" a fait en trois jours ce que j’ai fait en dix mois, mais les deux œuvres contiennent la même sensibilité, la même admiration et le même respect de Romy Schneider. De mon côté, j’ai pris les dix derniers mois de sa vie, entre le décès de son fils et sa propre mort, avec cette question en toile de fond : «Comment continue-t-on à vivre lorsqu'on a perdu un enfant ?» Et comme je ne pouvais pas me contenter de me concentrer sur cette période, il y a des flash-back qui repartent dans des moments de son existence comme son enfance, Alain Delon, Sissi, "La Piscine", son premier mari… L’abandon du père quand elle a 5 ans correspond à l’abandon du fils quand elle en a 40, la trahison de Delon renvoie à la trahison de sa mère…
Pourquoi Romy Schneider fascine toujours ?
Ça tient à la magie de son image. Il y a des personnages, comme elle, qui dégagent quelque chose. On pense aussi à Audrey Hepburn. Romy Schneider reste très moderne dans sa beauté. Il y a aussi un destin bouleversant, pathétique. Mais je pense que la modernité de sa beauté, son côté inusable, fait que de nombreuses jeunes femmes d’aujourd'hui s’intéressent à elle. Les films de Claude Sautet gardent Romy Schneider en vie, par-delà la mort. On a toujours envie de revoir "César et Rosalie", "Les Choses de la vie", "Max et les ferrailleurs"… J’espère que les gens qui lisent mon livre ont envie ensuite de voir un film avec Romy Schneider.
Qu’a-t-elle apporté au cinéma, selon vous ?
On a tendance à oublier que c’est une actrice prodigieuse, tellement le personnage a dépassé l’actrice à cause des drames, de la mort de son fils. Elle peut tourner n’importe quoi : "L’important c’est d’aimer" et "César et Rosalie" sont aux antipodes. Elle apporte une vérité, elle a une voix extraordinaire, elle parle juste. En revoyant "Sissi", je me suis aperçu que, quand elle avait 16 ans, elle était déjà une actrice formidable. Elle a apporté une présence qui dure.
Que pensez-vous des critiques de sa fille Sarah Biasini à propos de "Trois jours à Quiberon" ?
Je ne comprends pas parce que c’est un peu aberrant de dire «ma mère n’a jamais bu». Tous les réalisateurs et acteurs qui ont tourné avec elle peuvent témoigner. Il suffit d’ouvrir mon livre pour le savoir. Et en même temps, je comprends. D'abord parce que c’est sa fille. Elle n’a pas envie qu’on vienne raconter cela sur sa mère et, surtout, elle avait 4 ans et demi quand sa mère est morte. Tout ce qu’elle sait de la vie de sa mère, elle l’a appris par son père, et son père est dans cette optique-là. J’ai entendu Daniel Biasini chez Laurent Delahousse, il y a quinze jours, il tient le même discours. Je parle aussi de l’alcool et des médicaments dans mon livre, parce que cela fait partie de la vie de Romy Schneider, mais, selon moi, ce n’est pas la cause. C’est la conséquence d’une vie qui a été assez malheureuse avec beaucoup de trahisons et d’abandons. Il faut en parler parce que cela existe, mais cela ne fait pas partie de la personnalité de Romy Schneider.
Propos recueillis par Laure Beaudonnet
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