"Boccace 70"
Il y en vait encore un, signé celui-là par Monicelli, l'excellent metteur en scène du "Pigeon", de "La grande guerre", surtout. Mais cela eut fait un film à quatre sketches alors que réduite aux dimensions de trois, dus à Fellini, à Luchino Visconti et Vittorio de Sica, la projection occupe déjà largement 2h40 d'écran.
Je dois avouer une relative déception. Est-ce une pproximative question d'étymplogie, les trois auteurs de l'actuel "Boccace 70" m'ont semblé avoir fait l'école... buissonnière et je vois mal, d'ailleurs, ce qui les apparente au "Décaméron" : cela se serait plus pertinemment désigné, comme dans nos bons films commerciaux 1962, sous l'appellation "L'italien et l'amour". Tout cela flâne sous la caméra, bavarde, bavarde interminablement et souffre d'un défaut double et commun aux trois épisodes : l'indigence d'invention - c'est bien dommage de devoir adresser au scénariste fameux du néo-réalisme, César Zavanetti un tel grief - et la profusion de monologues superflus.
La première de ces trois pochardes [...].
J'aime beaucoup mieux ce que Visconti a fait des fragiles amours d'un comte (Thomas Milian), italien désireux de redorer son blason et de la riche héritière d'un B.O.F. germanique (Romy Schneider). La peinture d'une certaine dégénérescence des aristocrates de Sienne, de Florence, de Milan ou de la capitale romaine, résignés à vivre la Dolce vita" autour de la vontaine de Trévi... enfin, tout ce que la presse de grand information remue à plaisir de pourriture et de particules saint-tropéziennes, de la Riviéra à la Sardaigne, il y a quelque chose à dire...
Mais on connaît Visconti. Merveilleux dans le réalisme de "La terre tremble" ou d' "Ossessione", il ne peut se défendre d'un esthétisme de condottiere collectionneur de sensations et d'objets précieux. C'est ainsi qu'il traite ses personnages, enfermant Romy Schneider dans les pattes de velours de petits chats persans, les collections de Chanel et des non-romans de Robbe-Grillet. alors, bien que persuadés de la justesse d'information de Visconti, qui, dilettante stendhalien, appartient à ce monde-là, on baille un peu en prenant soin de ne pas mettre sa main devant ses yeux, à défat de sa bouche, car Romy se déshabille très très joliment.
Le troisième de ces sketches ne s'embarrasse pas de tant de délicatesse. Dame Sophia Loren est une p... selon Vittorio de Sica ; elle tient tir forain et, chaque soir, dans les kermesses villageoises où sa roulotte l'entraîne, elle livre les délices apparentes de son corps sinusoïde au gagnant d'une tombola clandestine qui fait vivre sa petite famille. C'est truculent ; les personnages secondaires sont choisis avec la fougue paysanne des dimanches de foire. Dire que ce soit infiniment drôle, non, car cela reste un peu gros. Mais Sophia Loren est bien jolie. Ce n'est pourtant pas à cause d'elle que je m'écrierai : "Dommage qu'elle soit une p..." ! en pendant à la tragédie qu'interpréta, déjà sous Visconti, Romy Schneider. Cette Romy Schneider qui, enfin débarassée de ces "Sissi", se révèle intéressante à regarder. Et le plus joli souvenir du film !
Henry MAGNAN
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