Arte consacre ce soir une soirée spéciale à Romy Schneider. Actrice intense, en 1975, elle évoquait sa passion du cinéma.
Le 12 février 1975, France Roche se rend sur le tournage du dernier film d'Andrezj Zulawski, L'Important, c'est d'aimer. Entre deux scènes, la journaliste s'entretient avec Romy Schneider qui tient l'un des rôles principaux. Un rôle d'actrice ratée. Ensemble, elles évoquent la place du cinéma dans la vie de la comédienne.
France Roche la présente d'emblée comme : "La comédienne la plus demandée et la plus payée du cinéma français" et lui demande comment elle a abordé ce rôle d'actrice ratée. Romy lui répond que : "Il y a ¾ de ce personnage qui se sépare complètement de moi-même et ¼ qui se rapproche de moi-même."
Elle raconte ensuite qu'elle s'est servie des émotions de ses débuts, une époque où elle a connu deux années compliquées : "on commence à se poser des questions. On a beaucoup moins confiance en soi-même. On a peur. On est très angoissé. Et on se dit : on ne veut plus de toi. Qu'est-ce qu'il faut faire ?"
Elle ajoute, que pour elle le cinéma : "c'est presque un vice, une passion telle, en tout cas pour moi, que je ne pourrais jamais faire autre chose. J'espère que je saurais arrêter au moment juste. Ne pas continuer quand vraiment rien ne va plus et quand on n'a plus rien à donner."
Elle aboie, vitupère, hurle, menace, roule des yeux méchants..la mégère est indomptable et son père bien désespéré de ne la point marier ! Suspense. Allez vite au théâtre assister à l’heureuse issue.
Scène dépouillée marquée de quelques bancs, linge blanc qui pend, on s’imagine dehors sans trop savoir. Deux individus discutent à propos de deux sœurs, une charmante Bianca et une furie Catarina…
La pièce de William Shakespeare, mise en scène et adaptée par Frédérique Lazarini, nous plonge dans les années cinquante autour d’un cinéma ambulant en Italie. Et on prend goût à cette alternance de scènes entre les acteurs devant nous et d’intervalles sur la toile, en noir et blanc. Un rythme qui dynamise la pièce, nous tient en haleine.
Le grand dramaturge passionné par l’Italie, vive Roméo et Juliette !, nous dévoile les désirs d’une femme aux aspirations résolument moderne qui entend bien vivre à sa guise, d’une libre parole, sans contrainte ni mari pesant sur le dos. Elle est rattrapée par son époque et quand un galant se présente, le père ne peut qu’accepter avec grande joie, le mariage de sa terrible fille. Issue inespérée !
Et par la fine connaissance psychologique de Shakespeare, la belle héroïne va demander grâce à son mari ! Aux spectateurs de découvrir par quel miracle ?
Quand à la soeur, par un changement d’état, pour finir prévisible, la douce Bianca, elle, se lasse de son calme et gentil époux et devient incertaine et morose.
Ah les mystères du cœur féminin !
Entre cris et rage, baisers torrides et discussions, on se plait à rire et à se laisser distraire par cette comédie originale dans son traitement, mordante, haute en couleurs. Les comédiens, mené par Petruchio alias Cédric Colas et Catarina ou Sarah Biasini sont excellents, servis avec talent par le père, la sœur et les autres comédiens.
Vraiment un bon moment passé grâce à une pièce plaisante dans le fond comme dans la forme !
Une adaptation et une Mise en Scène où le talent fait rage, de Frédérique LAZARINI, assistée de Lydia NICAUD.
Très honnêtement, c'est la première "Mégère", hors parodie, où je prends autant de plaisir.
Nous sommes en 1950, sur la place d'un village au Sud de l'Italie, un cinéma ambulant va y donner une représentation.
Nous passons souvent de ceux de l'écran à ceux qui sont sur scène. On regrette d'ailleurs de ne pas voir "en vrai" Bianca, si bien jouée par Charlotte DURAND-RAUCHER.
Sur scène: Sarah BIASINI, qui ressemble tant à sa maman. Mais, si Romy SCHNEIDER était encore là, on lui demanderait si c'est bien elle la mère de Sarah Biasini. Sarah a vraiment beaucoup de talent ! Cédric COLAS, le Petruchio que l'on imagine. Pierre EINAUDI, très "en place". Maxime LOMBARD, qui fait beaucoup penser à Michel Galabru. Guillaume VEYRE, virevoltant et très drôle.
Sur l'écran, il y a aussi : Didier LESOUR , Jules DALMAS et Hugo PETITIER. Trois très bons comédiens.
Scénographie et Lumières : François CABANAT. Costumes: Dominique BOURDE, assistée de Emmanuelle BALLON. Le film projeté est réalisé par Bernard MALATERRE.
Une soirée d'une légèreté talentueuse, c'est un sans faute ! Le comédien Bernard Ménez qui était dans la salle n'a pas boudé son plaisir. Mardi: 20H30 - Mercredi & Jeudi: 19H00 - Vendredi: 20H30 - Samedi: 17H00 et 20H30 - Dimanche: 17H00.
Une adaptation, des comédiens, dont on va garder longtemps la mémoire...
Des bancs de bois alignés de part et d'autre et les uns derrière les autres semblent prolonger les gradins de l'Artistic Théâtre nous rendant spectateurs d'un cinéma ambulant trônant sur une petite place éclaboussée de soleil et ceinte de palissades de draps immaculés sur lesquelles sont épinglées chemises, combinaisons blanches comme neige (chaude et lumineuse scénographie de François Cabanat) et d'où surgiront les comédiens.
On y respire l'ambiance de l'Italie des années 50-60 et lorsque Sarah Biasini qui interprète le personnage tempétueux de Catarina retirera quelques vêtements qui sèchent, se superposera l'image de Sophia Loren lorsqu'elle étend son linge dans "Une journée particulière" d'Ettore Scola.
La mise en scène judicieuse de Frédérique Lazarini - également majestueuse comédienne, elle était flamboyante dans Lucrèce Borgia de Victor Hugo - mêle intrinsèquement différentes périodes et différents styles d'autant qu'elle s'appuie sur le matériau cinématographique de la comédie italienne pour illustrer la pièce de Shakespeare au théâtre (réalisation du film Bernard Malaterre).
Sur le plateau de l'Artistic Athévains, l'épopée burlesque et survoltée de la "Mégère" est très resserrée et se joue à cinq personnages alors que d'autres personnages prennent vie dans de piquantes séquences filmées, comme la soeur cadette Bianca (Charlotte Durand-Raucher) et les deux prétendants Hortensio et Gremio jetant à ses pieds d'éprises déclarations.
Des intermèdes savoureux comme la pantalonnade farfelue du mariage sont projetés sur l'écran où se poursuit donc une partie de la pièce, créant un décalage scénique renforcé par le saut effectué à travers des décennies différentes.
Sur le plateau de l'Artistic Athévains, l'épopée burlesque et survoltée de la "Mégère" est très resserrée et se joue à cinq personnages alors que d'autres personnages prennent vie dans de piquantes séquences filmées, comme la soeur cadette Bianca (Charlotte Durand-Raucher) et les deux prétendants Hortensio et Gremio jetant à ses pieds d'éprises déclarations.
Des intermèdes savoureux comme la pantalonnade farfelue du mariage sont projetés sur l'écran où se poursuit donc une partie de la pièce, créant un décalage scénique renforcé par le saut effectué à travers des décennies différentes.
Ainsi, on plonge dans la Commedia dell’arte avec ses fanfaronnades, on croise le personnage de Toto, très en vogue au début des années cinquante, défilent des photos de femmes des années soixante au tempérament affirmé comme La Magnani, la Mangano...faisant parallèle au caractère impétueux de Catarina.
On est dans l’Italie de «la Dolce vita» de Fellini, dans le « Mariage à l'italienne » de Vittorio de Sica, «Le lit conjugal» de Marco Ferrerro... Les époques s'enchevêtrent et les costumes des comédiens s'interchangent, tantôt élisabethains tantôt modernes (costumes Dominique Bourde).
Dans cette atmosphère italienne joyeuse et exubérante accompagnée de musiques sucrées et sensuelles, les comédiens interprètent la partition avec une ardeur puissante et une vitalité communicative.
Cédric Colas est un Petruchio plein d'énergie, à la verve endiablée, jouant le méchant avec délectation, martyrisant à souhait la fragile et néanmoins robuste Sarah Biasini, qui se défend avec fougue et donne un éclat exquis à Catarina.
Maxime Lombard au truculent accent est un père à l'obstination bornée ne fléchissant aucunement devant la volonté de marier sa fille aînée avant la plus jeune malgré les suppliques de Lucentio, l'amoureux transi de Bianca joué par Pierre Einaudi. Quant au valet Grumio - Guillaume Veyre - c'est en vrai bouffon qu'il aide son maître à humilier Catarina pour la rendre servile.
Les scènes de privation sont absolument cocasses. Cependant, lorsque la farouche épouse ravalera sa fierté, rien que parce que son corps crie famine et tombe d'épuisement par manque de sommeil, Petruchio, lui, ayant eu le plaisir sadique de faire plier le réel à son désir, finira par abdiquer devant cette résistance qui cède tout au moins en apparence.
A la fin de la pièce, l’héroïne lit un texte de Virginia Woolf, rendant hommage à la sœur de Shakespeare qui n’a pas existé et n’aurait pas pu faire sa carrière… Frédérique Lazarini assure la revanche de Catarina par cette tirade provocatrice.
Dans cette mise en scène débridée, haletante, réjouissante, la Catarina composée par Sarah Biasini n'est pas une harpie belliqueuse, arrogante et insupportable. Elle est une jeune femme vulnérable qui veut affirmer son identité, revendique le droit à la parole, se rebelle et se dresse contre la prédominance masculine et l'autorité patriarcale.
Elle semblera accepter la compromission quand elle trouvera l'homme qui, en fait, est sur la même longueur d'onde qu'elle et qu'entre eux la liaison orageuse se fera jeu amoureux où chacun devient tour à tour l'objet de l'autre. Il suffisait que Petruchio apprenne à Catarina à se faire aimer même si la manière est fort rude pour que celle-ci se décide à aimer également.
C'est frais, tout va très vite, on rit. Humour, jubilation, insolence sont de mise dans cette comédie picaresque réinventée et haute en couleurs.
Frédérique Lazarini a adapté (assistée de Lydia Nicaud) et mis en scène La Mégère apprivoisée de William Shakespeare, pièce elle même adaptée d’un conte populaire. Le résultat, à ne pas rater au Artistic Théâtre Athevains se synthétise en une joyeuse farce à l’italienne délicieusement et caustiquement misogyne.
Elle a retiré la sous-intrigue façon jeu de l’amour et du hasard qui vient s’entuiler à l’intrigue principale dans le texte original. Elle a permuté l’épilogue en le remplaçant par un manifeste féministe extrait d’une chambre à soi de Virginia Woolf. Elle a ajouté des chansons en italien, des chorégraphies clownesques et quelques accessoires délicieusement anachroniques. Elle, c’est Fréderique Lazarini, magnifique comédienne (récemment dans "Qui a peur de Virginia Woolf", et actuellement dans "Les témoins" de Reuzeau) qui confirme ici son talent de metteuse en scène. Et de direction d’acteur, car le premier plaisir du spectateur consiste en ses joyeuses retrouvailles avec des comédiens à l’impressionnante force burlesque. Cédric Colas, dernièrement dans un désopilant "Le Fil à la patte" tient par son implication et son alacrité la pièce de bout en bout. La pièce respecte un tel rythme grâce à son jeu exalté et plastique alternant fausse colères à franches rigolades. Il adosse son jeu à la brillante et lumineuse Sarah Biasini, à l’hilarant duo Pierre Einaudi, Guillaume Veyre et au truculent acteur provençal avé accent Maxime Lombard. Charlotte Durand Raucher, elle aussi, qui n’apparaît qu’en vidéo impressionne par sa performance comique.
Tout commence dans une salle de cinéma où, à la suite du prologue, un film en noir et blanc présente l’ensemble des personnages et pose l’intrigue. Tout est organisé avec précision en vue de bâtir un show festif. La mécanique émerveille, les gags fonctionnent, les adresses au public nous embauchent. La pièce ressemble à une farce populaire à la Molière ou à la Goldoni, devient un Shakespeare à la plume trempée dans l’ancien écrivain de théâtre lubrique John Ford. Nous sommes emportés dans une clownerie de cirque doublée d’une pièce pastiche. Le public, qui ne ment jamais glousse souvent, rit beaucoup d’un rire clair.
L’intrigue se résume facilement. Pour respecter l’ordre de la bienséance, un père doit marier sa fille aînée avant la cadette, sauf que celle-là est une mégère. Profondément insoumise, résolument moderne avant la lettre, la Mégère apprivoisée revendique le droit à la parole et à une certaine liberté. Dans les années 50 en Italie, Catarina ne se laisse pas faire. Elle est en rébellion contre toutes les autorités patriarcales de son temps. Le malicieux prétendant Pétruchio (Cédric Colas) saura seul la dompter à force de privations et de sévices. Shakespeare se place du coté des hommes et à la fin de sa rééducation, Catarina dans une tirade qui nous apparaît hallucinante aujourd’hui clamera sa soumission consentante à son mari.
Les rire redoublent devant une telle misogynie. Mais la farce imaginée par Frédérique Lazarini est construite pour ridiculiser les hommes et, en guise d’épilogue, la comédienne qui joue la mégère, son rôle tenu et conclu, se dresse au proscenium devant nous complice pour clamer quelques lignes de "Virginie Woolf". Épatant. Par ce geste, la pièce se transforme en un manifeste anti-machisme.
On finira la soirée dans un restaurant italien à boire du Moscato en rejouant les nombreux gags de la pièce.
Frédérique Lazarini prend le pari audacieux de rapprocher Shakespeare et le cinéma italien des années 50.
Frédérique Lazarini, qui met en scène "La Mégère apprivoisée" de William Shakespeare, fait un choix singulier en mélangeant séquences filmées et comédiens endossant leur rôle spécifique. Très vite l’intérêt de la pièce va se déplacer sur un personnage féminin dont le comportement violent, acariâtre, survolté, va en quelque sorte conditionner tout le déroulement de la pièce.
Il s’agit de Catarina, la fille aînée de Baptista, dont le caractère bien trempé donne des cauchemars à son père qui n’a qu’une idée en tête : lui trouver coûte que coûte un mari. Un personnage va heureusement permettre ce miracle : il s’agit de Lucentio, amoureux de la fille cadette Bianca. Celui-ci ne peut obtenir la main de celle-ci que si l’aînée trouve un mari, donc Lucentio doit à tout prix découvrir un prétendant pour Catarina. Aussi lorsque Lucentio fait miraculeusement la connaissance de l’homme providentiel, Petruchio, il sait que son rêve d’épouser Bianca va ainsi se transformer en réalité. Petruchio va sans tarder faire une cour effrénée à la terrible Catarina, bien décidé à mater cette tigresse. Sa méthode pour arriver à ses fins se révèle fort peu orthodoxe, soumettant la malheureuse Catarina à de rudes tourments.
Elle va ainsi subir de terribles contraintes de la part de Petruchio, bien décidé à dompter un animal rétif qu’il se fait fort de ramener à la raison. Après un mariage mouvementé obtenu au grand soulagement du père de la mariée, le pugilat entre les deux époux va s’amplifier mais va finalement tourner à l’avantage de Petruchio, intraitable, impitoyable et parvenant à métamorphoser sa tigresse en toutou docile, abdiquant toute velléité de résistance face à un mari aussi décidé à la vaincre. Paradoxalement, c’est Lucentio dorénavant marié à Bianca, sœur cadette de Catarina, qui va commencer à avoir des ennuis avec son épouse dont les états d’âme semblent fluctuer, émettant des doutes quant à son amour indéfectible à l’égard de son mari. Dans cette pièce, William
Shakespeare rend donc un hommage appuyé à la combativité féminine refusant la suprématie machiste.
Saluons l’interprétation particulièrement vive et fulgurante de Sarah Biasini, campant idéalement Catarina, alors que Cédric Colas incarne avec une fausse désinvolture et une insolence inouïe le rôle de Petruchio. Ne négligeons pas le reste de la distribution incarnant avec efficacité les autres personnages de la pièce. Frédérique Lazarini, qui met en scène cette Mégère apprivoisée de William Shakespeare, parvient, malgré une simple adaptation du texte original, à restituer à sa façon un certain esprit du théâtre élisabéthain.
News suite à la pandémie du Covid-19 : Le Festival est reporté d'une année ! Rendez-vous très bientôt pour plus de news...
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Affiche de la 2e édition du Festival Romy Schneider à Turckheim du 11 au 19 juillet 2020
Au programme : Conférence - Exposition - Film - Animations Coup de projecteur sur la filmographie de Claude Sautet, réalisateur, qui nous a quittés il y a 20 ans et dont Romy Schneider fût son égérie dans cinq films.
Vendredi 10: dans le cadre de l'inauguration du Festival : conférence sur Claude Sautet par Daniel Uhmann- 20h - Espace Rive Droite.
Mercredi 15 : projection du film ''Les choses de la Vie'' - Claude Sautet - 20h30 - Espace Rive Droite.
Dimanche 19 : défilé de voitures anciennes en vieille ville.
La metteuse en scène et comédienne a monté “La Mégère apprivoisée”, une pièce qui chahute les codes identitaires attachés aux deux sexes.
Excentriques de la scène, furieux des planches, certains heureusement osent trop, en font trop et transforment leurs rêves en délirante réalité. Christian Hecq et Frédérique Lazarini, acteur(rice) et metteur(euse) en scène, sont de ces excessifs dont la vie entière semble théâtre et dont la folle énergie constamment émeut. La seconde, sans la jouer — ce dont elle aurait eu toute la démesure —, a monté une Mégère apprivoisée de sa façon. Elle a métamorphosé la tourbillonnante comédie shakespearienne (1594) en une de ces farces caustiques et tendres qu’affectionnait le cinéma italien des années 1950-1960. Shakespeare aimait fort l’Italie, on le voit à ses nombreuses pièces situées là-bas ; en homme de la Renaissance, il narguait tout type de frontières. Et sans doute appréciait-il la liberté et l’audace de narration de la commedia dell’arte qui y surgirent au début du XVIe siècle. Une vitalité qui enchante
Pourquoi alors ne pas revisiter l’Italie en l’adaptant ? Et une Italie d’après-guerre en plein mouvement, renouvellement, où les femmes commencent à revendiquer et prendre leurs places. Comme à l’âge baroque. Catarina est ainsi réputée « mégère » parce qu’elle clame ce qu’elle pense, rejette l’autorité du père comme l’hypocrisie régnante, face à une sœur plus jolie et douce qu’elle, Bianca, dont tous les jeunes hommes seraient fous. Peut-être, aussi, parce que ces deux filles-là sont de riches héritières… Histoire d’apparent dressage amoureux, de jeux de rôle masculin-féminin : Shakespeare chahute les codes identitaires traditionnellement attachés aux deux sexes. Autour d’un cinéma ambulant, sur une place de village, chacun joue ici la partition sociale et sentimentale attendue, sous le regard ironique, sceptique, voire cynique de l’auteur…
Belle idée que d’avoir recentré sur cinq acteurs la comédie endiablée. L’adaptation court à l’essentiel avec une vitalité qui enchante. Sur grand écran, face au public, des scènes qu’on ne verra pas en chair et en os activent l’action ; sur le plateau, des acteurs caracolent dans une sarabande amoureuse, ils s’amusent de leurs masques, défient leurs propres désirs. Sarah Biasini impose une Catarina carrée, franche, solaire, féministe déjà. Et si forte que Bianca, sa sœur rivale, est condamnée à n’apparaître qu’à l’image. La première forme avec Cédric Colas, bondissant et troublant Petruchio, un couple irrésistible qui compose avec humour avec la société de son temps…
Adèle Haenel reprend dans ce clip troublant de Claire Burger le rôle sensuel et libertin de Romy Schneider dans le film inachevé d’Henri-Georges Clouzot. À voir dans toutes les salles mk2 à partir d’aujourd’hui !
L’histoire du cinéma est hanté de films maudits. Cléopâtre de Joseph Mankiewicz et ses 35 millions de dollars de budget qui ruinèrent la Fox, Apocalypse Now, qui fit perdre à Francis Ford Coppola 40 kilos. Mais la Palme du plus beau fiasco revient à L’Enfer, oeuvre inachevée d’Henri-Georges Clouzot, si ambitieuse et coûteuse qu’elle ne verra jamais le jour, provoquera le burn-out de son acteur principal Serge Reggiani et l’infarctus du réalisateur. Soixante plus tard, les rush muets et évanescents du film (15 heures de pellicule exhumées par Serge Bromberg dans un splendide documentaire intitulé L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot sorti en 2009) continuent d’alimenter les fantasmes cinéphiles. La preuve: il constitue la matière première du dernier clip de KOMPROMAT -duo formé par Rebeka Warrior (Sexy Sushi) et le musicien électro Vitalic- réalisé par la française Claire Burger (Party Girl, 2014, C’est ça l’amour, 2018).
Viscérale et psychée, la vidéo met en scène Adèle Haenel, sorte de double contemporain de Romy Schneider, reprenant les postures mythiques de l’actrice dans le film original et déclamant de sa voix rauque des lyrics allemands (« Les nuits sont longues mon amante Comme une ivresse obsédante »). Comme pour combler les images manquantes du film de Clouzot, Claire Burger recréé l’érotisme hypnotique des prises de vue de L’Enfer: alternance de noir et blanc et d’éclairages saturés, corps enduits de paillettes et de maquillage, fluides en tout genre (fumée de cigarettes, pellicule d’eau) venant texturer la pellicule et sculpter les silhouettes.
On le sait: avec L’Enfer, Clouzot avait l’ambition de plonger le spectateur dans la folie destructrice de son personnage principal, mari à la jalousie maladive et paranoïaque. Pour donner chair à cette idée, le cinéaste expérimente des effets spéciaux modernes (inspirés de l’art cinétique de Vasarely), met au point avec Éric Duvivier l’Héliophore, système d’animation visuel de plaques de couleurs métallisées, dessine des centaines de storyboard graphiques, travaille avec Bernard Parmegiani, compositeur de musique électroacoustique. En voyant le clip synesthésique et mental de KOMPROMAT, on se dit qu’il n’y avait pas meilleure façon de rendre hommage à l’esthétique visionnaire débordante de Clouzot. Si tout ça a réveillé en vous le désir de vous replonger dans la mythologie folle du film, on recommande chaudement Romy dans l’enfer, texte de Serge Bloomberg (Albin Michel-Lobster).
Léa André-Sarreau
Un hommage si magnétique qu’on a voulu le confronter aux rushs originaux : CLIC ICI