Source : Nouvel Observateur - 28 février 2011
Attention : Pour rendre hommage à Annie Girardot, de nombreuses chaînes de télévision bouleversent leur programme :
- France 2 : "Un jour, un destin" à 22h05
- Paris Première : "Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas... mais elle cause" à 20h35 puis "Rocco et ses frères" à 22h10
- France 3 : Reportage "Ce soir ou jamais" à 23h00
- TF1 : Doc "Annie Girardot, ainsi va la vie" à 22h55
- TV5 Monde : "Traitement de choc" à 23h30
- France 3 : Soirée spéciale le jeudi 03 mars prochain
- France 2 : "Docteur Françoise Gailland" le 08 mars à 00h15
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PARIS (AP) — "Une gigantesque actrice": Annie Girardot s'est éteinte lundi à Paris à l'âge de 79 ans. L'une des comédiennes françaises les plus populaires, elle était à la fois saluée par ses pairs et appréciée du grand public, qui avait été ému par son retour au cinéma après sa traversée du désert dans les années 1990.
Annie Girardot souffrait depuis plusieurs années de la maladie d'Alzheimer.
Elle avait obtenu le César de la meilleure actrice pour "Docteur Françoise Gailland" (1976) de Jean-Louis Bertuccelli, et deux fois celui du meilleur second rôle féminin pour "Les Misérables" (1995) puis "La Pianiste" (2001).
Au théâtre, elle avait reçu le Molière de la Meilleure comédienne dans "Madame Marguerite" en 2002. Elle avait commencé à la Comédie française -où elle avait été pensionnaire de 1954 à 1957.
Née le 25 octobre 1931 à Paris, Annie Girardot fait le conservatoire où elle obtient un premier prix de comédie en 1954. Elle débute au cinéma dans des films noirs, en donnant notamment la réplique à Jean Gabin dans "Le rouge est mis" (1957). Puis elle est la partenaire d'Alain Delon dans "Rocco et ses frères" (1960) de Luchino Visconti. Sur le plateau, elle rencontre le comédien Renato Salvatori (1934-88), qu'elle épouse et à qui elle donne une fille, Julia.
Elle poursuit sa carrière parallèlement en Italie, jouant par exemple pour Marco Ferreri, et en France. Elle tourne sous la direction de Michel Audiard dans "Elle parle pas, elle fume pas, elle drague pas, mais... elle cause!" (1969) ou encore "Elle cause plus, elle flingue" (1972). A l'écran, elle forme un couple récurrent avec Philippe Noiret, dans "La vieille fille" (1971) et "La mandarine" (1972) notamment. Dans "Mourir d'aimer" (1971) d'André Cayatte, elle incarne une enseignante amoureuse de l'un de ses élèves et acculée au suicide, un drame inspiré d'un véritable fait divers.
Dans les années 1970, Annie Girardot devient une figure du cinéma populaire. Elle passe devant les caméras de Philippe de Broca (pour "Tendre poulet" en 1978 et pour "On a volé la cuisse de Jupiter" en 1980), de Claude Zidi ("La zizanie", 1978) et d'Edouard Molinaro ("Cause toujours... tu m'intéresses!" 1979).
Avec sa voix de fumeuse, ses cheveux courts et son franc-parler, elle incarne à l'écran une femme moderne. "Elle a marqué son époque, symbolisant de façon éclatante la femme des années 70", souligne Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, en saluant "une actrice profondément moderne, parce que féministe, n'hésitant pas à endosser le rôle de médecin (...) et de tant de professions autrefois exclusivement réservées à la gent masculine".
"C'était une gigantesque actrice", a déclaré le réalisateur Bertrand Blier sur LCI. Annie Girardot, "c'est la voix, la vitesse, l'insolence du propos, la gouaille qui remonte à Arletty", a-t-il résumé. "Toutes les jeunes actrices pensent à elle aujourd'hui". "Elle est dans le cinéma l'équivalent de Piaf dans la chanson", a renchéri sur la même chaîne Claude Lelouch, qui l'avait dirigée dans six films, dont "Vivre pour vivre" (1967) et "Un homme qui me plaît" avec Jean-Paul Belmondo (1969). C'est Claude Lelouch qui, alors qu'elle est boudée par d'autres réalisateurs, lui offre son retour au grand écran, dans "Les Misérables".
Le film lui vaut en 1996 le César de la meilleure actrice dans un second rôle, qu'elle vient chercher, en larmes, lors de la cérémonie. "Je ne sais pas si j'ai manqué au cinéma français, mais à moi le cinéma français a manqué... follement, éperdument, douloureusement", avouera-t-elle devant une salle bouleversée. "Votre témoignage, votre amour, me font penser que peut-être, je dis bien peut-être, je suis pas encore tout à fait morte".
Elle remportera encore un César pour son second rôle dans "La Pianiste" de Michael Haneke, où elle joue la vieille mère possessive de la musicienne incarnée par Isabelle Huppert. Ensuite, elle se fait plus rare. En 2006, sa fille annonce à "Paris-Match" qu'elle souffre de la maladie d'Alzheimer depuis trois ans. Annie Girardot est décédée lundi matin à l'hôpital Lariboisière, dans le Xe arrondissement de Paris, selon une source hospitalière.
Le maire de la capitale Bertrand Delanoë a salué "une grande Parisienne". "Sa gouaille, sa personnalité bien tranchée, son sourire, sa voix inimitable ont traversé les décennies pour marquer profondément la culture de notre pays", rappelle-t-il.
"Elle avait mis l'alliage étonnant de force et de sensibilité qui caractérisait son immense talent au service d'oeuvres qui mettaient en valeur l'héroïsme ordinaire des classes populaires, ou celui des femmes confrontées aux défis quotidiens de la vie familiale et professionnelle", a souligné le président Nicolas Sarkozy. "Le dernier témoignage de cette générosité qui faisait d'Annie Girardot une des actrices les plus populaires de notre pays, elle l'a donné en acceptant d'être filmée pour un documentaire portant sur la maladie d'Alzheimer dont elle souffrait".