Source : L'oeil d'Oliver - 30 janvier 2021
Avec son livre, La beauté du ciel, la comédienne Sarah Biasini entre par la grande porte dans le monde de la littérature. D’une plume bien ciselée, elle écrit à sa fille pour lui raconter d’où elle vient et, au fil des mots, elle se libère et passe de l’intime à l’universalité, celle de la vie qui se construit sur des blessures, des drames et surtout des joies.
Chère Sarah, puisque tu as écrit ce livre comme une grande lettre à ta petite Anna, ta "Beauté du ciel", je vais prendre le même chemin et t’écrire cette lettre pour te dire tout le bien que je pense de ton ouvrage.
Fragile et solaire
Sans être intimes, on se connaît depuis un moment, se croisant au fil de tes spectacles, récemment lors de la première au Cado dans "Mademoiselle Julie de Strindberg", mis en scène par Christophe Lidon. Je t’ai regardé mûrir sur la scène comme dans la vie. Ton jeu, solaire, est empreint de cette grande sensibilité que tu portes en toi. Tu es à la fois fragile et forte. J’ai toujours, surtout lors de nos papotages d’après spectacle, senti chez toi cette petite fracture que tu portes depuis l’enfance. Tu doutes, te questionnes et puis, au détour d’une idée, d’un mot, tu pars dans de grands éclats de rire. Le bonheur te va bien. Tout ceci se ressent dans ton livre.
Fille de Romy
Tu es fille de… Tout le monde connaît ta mère, cette grande actrice au destin tragique. Mais tu as raison, ce n’est pas de ta mère que nous parlons. Cette femme-là, nous ne la connaissions pas. Mais voilà, c’est le sort des personnages publics. On se les approprie comme s’ils faisaient partie de la famille. Romy a marqué par sa beauté, certes, mais surtout par son talent et les grands films dans lesquels elle a tourné. Ce sont "Les choses de la vie", "Une histoire simple", "César et Rosalie", "Le vieux fusil", "La passante du Sans-Souci", "Clair de femme", pour ne citer que mes préférés.
Une mère avant tout
Pour toi, c’est ta mère et elle est partie, te laissant à 4 ans avec ce vide immense, celui que laisse le vivant lorsqu’il meurt. Cela en fait des blessures qu’il faut apprendre à soigner, panser, colmater. Et c’est parce qu’un jour, des abrutis ont décidé de profaner la tombe de ta mère, que tu vas, sans t’en rendre compte, pouvoir faire ce deuil que l’on n’arrive de tout manière jamais à faire vraiment. Et tu le fais de la meilleure manière du monde, en devenant à ton tour mère. Cette petite fille, tu l’as rêvée si longtemps, elle a pris son temps pour venir. Un temps si long que tu as cru ne jamais connaître les joies de la maternité. Anna est arrivée parce que c’était son heure et que tu étais vraiment prête. Grâce à elle tu peux dire : «Tout va bien, j’aime les vivants, les morts aussi. Passons à autre chose. Je veux m’occuper de toi Anna. Il n’y a pas de fin à cette histoire. Tu grandiras, je vieillirai et c’est parfait ainsi».
Touchée en plein coeur
A travers tes mots, j’ai été émue, mais j’ai aussi bien ri en suivant le parcours de cette femme de quarante ans qui, par la maternité, se construit. J’emploie ce verbe car c’est bien de cela qu’il est question et non de reconstruction. On apprend à être mère et ceci tu le racontes divinement. Je ne serai jamais une mère, mais je sais, lorsque tu parles si joyeusement de ta grand-mère paternelle, que l’on peut donner de l’amour maternel. Comme je l’aime, tu lui diras. On apprend aussi à devenir une belle-mère et aimer l’enfant d’une autre. On apprend à vivre sans avoir peur de la mort. Et je te remercie de nous avoir fait partager les mots de ton amie Dolorès : «Tu ne dois pas avoir peur, la vie t’a déjà appris tout ça. Tu es vaccinée. La vie t’amène des histoires nouvelles, pas des histoires anciennes. Elle te surprend et ne t’amène jamais ce que tu attends».
Un livre universel
Oui ton livre nous parle à tous, parce que dans tes mots, dans tes doutes, tes peines, tes joies, tes petites bonheurs, tes malheurs, tes espérances, on s’y retrouve, cela nous parle, nous touche. J’ai vu défiler mes absents, mon père qui m’a laissée orpheline à 25 ans, ma petite sœur qui me manque tant, ma mère partie il y a bientôt deux ans à l’âge où il est normal de partir. J’ai vu défiler tous les enfants, neveux, filleuls, filles et fils d’amis que j’ai aimé voir grandir et accompagner. Ton livre parle de la vie et je t’en remercie.
Je terminerai cette lettre, en te souhaitant chère Sarah, tout le bonheur du monde et surtout promets moi que ce livre a fait naître en toi ce besoin d’en écrire plein d’autres. Je t’embrasse très tendrement.
Marie-Céline Niv
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