Source : Le Figaro - 13 juin 2018
REVUE DE PRESSE - N'en déplaise à Sarah Biasini, la fille de Romy Schneider, choquée par la représentation de sa mère en alcoolique dépressive, le film d'Emily Atef a séduit la critique. Une actrice «miraculeuse», un noir et blanc «somptueux» et la «justesse émotionnelle» du récit ont fait mouche.
Le biopic [NDLR : Ce film n'est pas un biopic !!!] dramatique d'Emily Atef prend place en Bretagne, durant une thalassothérapie. L'actrice Romy Schneider accepte une interview exceptionnelle, un an avant sa mort. Pendant plusieurs jours, elle va se livrer au journaliste Michaël Jürgs, par amitié pour le photographe Robert Lebeck qui l'accompagne. Lui raconter ses souffrances de mère, d'actrice, pour le magazine Stern. En pleine dépression, l'alcool la pousse à se confier, malgré les efforts de son amie Hildegard pour la protéger des «vautours». La réalisatrice franco-libanaise Emily Atef signe avec "Trois Jours à Quiberon" son quatrième long-métrage. Il a plu à la critique, ravie d'y retrouver l'essence de l'actrice des "Choses de la vie".
Une ressemblance qui conquiert la critique
La presse est époustouflée par la ressemblance de Marie Bäumer avec Romy Schneider. Ce rôle lui a valu en avril l'équivalent du César allemand, un "Lola" de la meilleure actrice [NDLR : le "César" allemand]. Pour Emily Barnett des Inrocks, elle est le «sosie de Romy Schneider». Son «interprétation solaire et torturée tend à gommer l'icône au profit de la femme confrontée à la tyrannie de son image.» Barbara Théate renchérit dans le Journal du Dimanche : «Marie Bäumer, lumineuse, fait preuve d'une grande justesse émotionnelle dans les excès de joie comme de peine».
L'actrice allemande de 49 ans est tout simplement «un miracle» pour Nicolas Schaller de L'Obs : «Tout trouble chez elle: sa ressemblance jamais forcée avec la star de "César et Rosalie", son naturel, l'invisibilité de son jeu. Elle est Romy, ou du moins l'image qu'on s'en fait, dès sa première apparition, de trois quarts dos.» La ressemblance est frappante. Yannick Vely de Paris Match insiste : «Il ne faut surtout pas négliger le travail d'incarnation, la direction d'actrice et le soin méticuleux de la composition». Il s'enthousiasme pour un «mimétisme frappant». «L'on retombe à nouveau amoureux de la fragilité et de la détermination de la star, comme si elle revenait à la vie devant nos yeux», admire-t-il.
Des termes que l'on retrouve dans plusieurs critiques, émues par ce film qui mêle des éléments de documentaire et de fiction. Télérama titre sur «une reconstitution troublante» de la vie de la vedette. Le film «donne l'impression de voir Romy ressuscitée», note Jacques Morice. L'Obs acquiesce et applaudit «un portrait bien senti, porté par de fines intuitions». «Mieux qu'un biopic, "Trois jours à Quiberon" est un instantané au travers duquel se profile une vie entière», analyse Nicolas Schaller. Étienne Sorin du Figaro est conquis : «Emily Atef évite les réponses toutes faites et la psychologie de comptoir». Son confrère Éric Neuhoff partage ce point de vue. Il assure que «ces "Trois jours" forment le contraire d'un biopic, cernent peut-être le moment où une vie risque de basculer». Pour lui, «il s'agit d'un instantané, d'une rêverie».
Le choix du noir et blanc est un succès
Seul Le Monde s'oppose à ces éloges, regrettant une absence de «point de vue» dans le biopic. Véronique Cauhapé est déçue par les sources sur lesquelles la réalisatrice s'est appuyée. Pour la journaliste, l'entretien publié dans Stern, et les photos prises à cette occasion «se révèlent insuffisants pour faire décoller le film.» «Faute de point de vue, "Trois jours à Quiberon" se contente d'aligner une succession de plans sur une actrice en proie au mal-être, réduisant l'envergure du film à celle d'un reportage au commentaire insignifiant et simpliste», tranche-t-elle.
Le choix du noir et blanc, qualifié d'«impressionniste» par Les Échos permet, lui, de fédérer unanimement la critique. Pour L'Obs, il rappelle celui «des photos de Lebeck, celui du souvenir, des cendres d'une époque où l'on fumait dans le hall des hôtels-sanatoriums». Un parti pris qui «donne une belle intensité à cette plongée quasi documentaire dans l'intimité et la souffrance d'une actrice connue pour sa fragilité», remarque Barbara Théate du JDD.
Cécile Rouden de "La Croix" conclut en rappelant l'histoire d'amour entre l'actrice allemande et l'Hexagone : «En France, où on a aimé passionnément Romy, il est difficile de ne pas être touché par ce film tourné en Bretagne dans un somptueux noir et blanc qui renvoie aux photographies de Robert Lebeck».
Par Julia Benarrous