Source : Avoir Alire.com - 18 mars 2014
La critique par Virgile Dumez
Réalisateur : Mocky, Jean-Pierre
Acteurs : Richard Bohringer, Frédéric Diefenthal, Sarah Biasini, Philippe Phaeton de Lasserre
Genre : Comédie dramatique
Nationalité : Français
Date de sortie : 19 mars 2014
Durée : 1h23mn
Plutôt sympathique par son humour décalé et sa volonté de dénoncer les errements de notre société, le nouveau Mocky pâtit d’une esthétique peu chatoyante et d’une fin bâclée.
L’argument : Lionel est un jeune homme marié, sa femme est sur le point d’accoucher. La vie serait heureuse s’il n’était pas étranglé par des dettes colossales. Désespéré, il décide un jour de kidnapper le bébé de 12 mois d’un couple de milliardaires et de leur demander une rançon. Mais tout ne va pas se passer comme prévu.
Notre avis : Désormais débarrassé des contraintes liées au financement classique du cinéma en tablant sur une économie à tous les échelons, le prolifique Jean-Pierre Mocky s’est également refait une petite santé auprès des critiques avec la réception plutôt positive de son dernier forfait, le très pessimiste Renard jaune. Toutefois, le réalisateur a toujours fait preuve d’une boulimie filmique qui lui a jadis porté préjudice puisque l’artiste ne se soucie guère de la finition et préfère enchaîner les tournages à la vitesse d’un cheval au galop plutôt que de s’attarder sur les fioritures. Parfois, cela passe, et souvent cela casse.
En ce qui concerne "Dors mon lapin", on se situe plutôt entre ces deux positions extrêmes puisque le long-métrage, peu soigné sur le plan esthétique, demeure sympathique de bout en bout, le réalisateur évitant de tomber dans l’hystérie qui caractérise bon nombre de ses œuvres antérieures. Certes, il se laisse toujours aller à la gaudriole pas finaude (le propriétaire de l’immeuble qui se fait faire des gâteries sous la table par une débitrice souhaitant éponger ses dettes), mais l’ensemble reste plutôt tenu pour du Mocky. Par contre, on apprécie sa volonté toujours intacte de dénoncer la situation accablant de plus en plus de travailleurs, endettés jusqu’au cou et poussés au désespoir par des patrons rapaces. Au passage, le cinéaste en profite pour se moquer des institutions qui en prennent pour leur grade. En cela, le flic incarné avec une belle distance ironique par Richard Bohringer fait écho à la traditionnelle misanthropie du réalisateur.
Souvent expéditif – mais on sait ce que l’on vient voir en fréquentant l’œuvre du réalisateur – "Dors mon lapin" séduit également grâce à l’interprétation très naturelle de Frédéric Diefenthal, vraiment très à l’aise dans un rôle qui lui va comme un gant. Dommage que le retournement de situation final soit expédié n’importe comment, car il aurait pu donner lieu à une dénonciation très puissante de l’abrutissement des masses sous l’ère sécuritaire de Sarkozy. Mal réalisée, cette fin laisse finalement froid et rate malheureusement sa cible. Sympathique malgré tout, le résultat final est donc un peu trop anecdotique pour marquer les esprits, d’autant que le rendu numérique de l’image n’est guère séduisant pour l’œil.
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