Eva : Hypocrite diSISSIpation
Fille aînée d’une famille viennoise farfelue, Nicole (Romy Schneider) écrit une pièce scandaleuse avec la complicité active de ses parents. Un directeur de théâtre chevronné accepte (en se voilant la face) de la monter. Enorme succès, bien entendu… La famille déménage, change de train de vie et achète un « DS19 » (sic). Un producteur américain survient, veut acheter très cher les droits d’adaptation pour Broadway et pour Hollywood.
La jeune fille alléchée par les dollars, dévoile son incognito. Le producteur (Carlos Thompson) croit découvrir une rouée et s’aperçoit que la demoiselle « faisait seulement semblant de faire »… La libertine était ingénue ! Il l’épousera… Ce résumé ne peut que suggérer la situation. Il ne révèle en rien le climat provocateur de ce film ignoble qui se comptait dans l’équivoque et dans la grossièreté. Jamais le double jeu n’a été, sciemment poussé plus loin. Les auteurs misent, avec préméditation, sur les deux tableaux : celui de la morale bourgeoise et celui de l’immoralisme affiché. Cette entreprise est menée avec une hypocrisie parfaite.
On gomme vite les audaces scabreuses pour les remplacer par un couplet bien pensant, aussitôt suivi par une nouvelle grivoiserie. On dirait un travail d’obsédé sexuel corrigé par un censeur pudibond. On se moque des enfants, des parents, de l’amour, de la famille et même de cette jeunesse désaxée qui ne croit plus à l’amour. Le plus sordide des films noirs est plus sain plus franc que cette « comédie » puante.
Toute l’opération repose sur un « trait de génie » commercial. Il consiste à démystifier Sissi, oie blanche, historique personnifiée par Romy SChnider. En dissipant Sissi, en faisant de son corps, de son visage, un argument « sexy », les auteurs de ces « Carnets de jeune fille » ont cru innover. Ils ont trouvé une étrange et inadmissible complice, celle de l’actrice Magda Schneider qui, cette fois encore, est la mère de l’héroïne en même temps que celle de la comédienne.
Pour qu’il soit sans doute impossible de distinguer l’une de l’autre : disons seulement que, dans le film, Magda Schneider fait du proxénétisme maternel, avec des remords et des circonstances atténuantes.
Marcel HURET
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