Sarah Biasini incarne Marie, un rôle principal et capital pour cette jeune comédienne, européenne convaincue. Elle vient d’ailleurs d’être choisie comme marraine des «Premiers Etats Généraux de l’Europe » organisés pour célébrer le 50e anniversaire du Traité de Rome. Une distinction qui l’honore mais ne fait pas tourner la tête de cette jeune femme épanouie et heureuse de retrouver les planches, avec la prochaine tournée en province de Pieds nus dans le parc, une pièce de Neil Simon mise en scène par Steve Suissa.
Etape
Mon but est que chaque rôle me fasse évoluer et celui de Marie est certainement une étape. C’est un personnage magnifique et j’espère avoir été à la hauteur. En voyant pour la première fois la version défi nitive du film, je me suis rendue compte de mes progrès de comédienne, mais je ne suis pas au bout de mon apprentissage et c’est tant mieux.
Une femme amoureuse
Il est difficile de dissocier cette histoire d’amour de son contexte. Et je reconnais qu’il m’a fallu du temps pour «dépasser l’uniforme», autrement dit, le fait qu’une jeune Française puisse tomber amoureuse d’un soldat allemand durant l’occupation. Mais je crois foncièrement au coup de foudre, à cette rencontre inexpliquée et irrésistible entre deux êtres. La relation entre Marie et Jürgen se noue en 1944, c’est à dire à la fin de la guerre. L’amour est certainement une forme de refuge, pour ces deux êtres qui vivent depuis des années, cernés par des évènements dramatiques et horribles.
Une louve pour son fils
J’ai été très touchée par la lecture d’Enfants Maudits, un ouvrage dans lequel Ludwig Worz et Jean-Paul Picaper ont rassemblé les témoignages de quelques uns de ces 200 000 enfants, nés des amours interdites entre une Française et un Allemand, des innocents qui ont payé après-guerre le prix de la rancoeur. Dans le film, rejetée par sa famille, Marie fuit à Paris où elle découvre qu’elle est enceinte. Elle accouche seule d’un petit garçon. Et pendant cinq ans, Marie va mentir pour protéger Pierre. A ses amis, elle raconte qu’elle a été violée, à son fils, que son père est parti très très loin. Elle ne veut pas que Pierre soit considéré comme un paria, qu’il ait à subir la haine des adultes ou la méchanceté de ses camarades d’école. J’aime la force de leur relation. C’est son petit homme à elle. Ils forment une vraie famille. Je n’ai pas d’enfant, mais je me suis attachée à suivre mon instinct maternel.
Emancipation féminine
Marie suit des cours à la faculté de droit et travaille dans une brasserie pour payer ses études. A travers elle, nous abordons l’émancipation de la femme française de l’époque, ces femmes qui ont pu voter pour la première fois en 1945, et qui commencent à entrer dans la vie politique. Marie milite, par exemple, en faveur du projet européen, à l’instar de cette scène où elle prononce dans un amphi un discours pro-CECA. Personnellement, je suis à la fois interessée et agacée par la politique, car c’est parfois difficile de se forger une opinion à partir des informations qu’on veut bien nous donner. Mais nous en débattons régulièrement entre amis. Notre génération a toujours connu l’Europe de la libre circulation et c’est vrai que je me sens profondément européenne, je pourrais aussi bien vivre en Angleterre, en Allemagne en Espagne ou en Italie.
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