Source : NouvelObs.com - 09 novembre 2009
C'est la rencontre de deux mythes du cinéma français: le film maudit et la star légendaire. En 1964, Romy Schneider tournait "L'Enfer", d'Henri-Georges Clouzot, un long-métrage qui ne sera jamais achevé. Quarante-cinq ans plus tard, et vingt-sept ans après la disparition de l'actrice, les images sortent enfin sur les écrans, dans un documentaire intitulé tout simplement "L'Enfer d'Henri-Georges Clouzot" (ce mercredi dans les salles françaises).
C'est Serge Bromberg, producteur et restaurateur de films, qui a convaincu la veuve du cinéaste de lui confier les 185 bobines (13 heures de pellicule) qui dormaient dans un placard, pour en faire un documentaire pas comme les autres. On y voit d'abord Clouzot, réalisateur de chefs d'oeuvre tels que "L'assassin habite au 21", "Le corbeau" ou "Le salaire de la peur", expliquer qu'il sort d'une dépression après le décès de sa première femme Véra, qu'il est insomniaque et écrit des scénarios la nuit, et qu'après être resté quatre ans sans tourner, il a décidé de s'attaquer à une histoire dont l'un des personnages principaux est, par moments, "dans un état pathologique".
Ce personnage est Marcel, patron d'un petit hôtel de province, interprété par Serge Reggiani. Maladivement jaloux, il est obsédé par l'idée que sa femme Odette (Romy Schneider) le trompe, et a des soupçons à tout moment et sur tout le monde. Au début du film on le voit, un rasoir à la main, devant le corps allongé d'Odette, essayant de se souvenir comment il en est arrivé là. Il tente de se remémorer leur vie à deux, le début heureux de leur histoire, l'achat de l'hôtel, la rencontre avec Odette, le mariage, le bébé... Mais très vite le souvenir se trouble, la jalousie et les visions se font plus présentes, et le spectateur à son tour est saisi par l'angoisse et le doute...
Les scènes de la vie réelle sont tournées en noir et blanc, celle des visions de Marcel en couleurs. Les premières sont d'un classicisme appliqué, les secondes au contraire font appel à des techniques nouvelles en déformant les images et les sons, en jouant avec les couleurs, le montage, le mixage. C'est ce film, à la réalisation révolutionnaire pour l'époque, que les spectateurs de 1964 auraient dû découvrir. Malheureusement le tournage s'arrêta au bout de trois semaines, en raison d'une crise cardiaque de Clouzot (qui s'en remettra, puisqu'il tournera un autre film en 1968, avant de décéder en 1977).
Alternant les extraits du film et les interviews, 45 ans après, de certains membres de l'équipe du film (dont Costa-Gavras, alors assistant réalisateur), Serge Bromberg raconte l'histoire de ce tournage particulier, d'où ressort un portrait de Clouzot en homme perfectionniste, autoritaire, dépassé par son projet. Le documentaire est complété par quelques scènes, jamais tournées, dont Bérénice Bejo et Jacques Gamblin, dans les rôles d'Odette et de Marcel, lisent les répliques, un procédé qui n'apporte pas grand-chose.
Les amateurs d'histoire du cinéma apprécieront que soit enfin levé le voile sur ce film inachevé mais mythique qui, s'il avait vu le jour, aurait sans doute fait grand bruit. Mais ce sont surtout les images de Romy Schneider qui marquent l'écran, notamment dans la partie en couleurs du film, celle des visions de Marcel rendu fou par la jalousie, où l'actrice est fascinante dans les essais, expériences et variations de tous genres que lui a imposés Clouzot. On n'entend jamais sa voix, mais on la voit, superbe, comme on ne l'avait jamais vue auparavant tout au long de sa carrière pourtant riche.
AP
14h13 dans Film-1964-Enfer, Presse - 2009, Revue Nouvel Obs | Lien permanent | Commentaires (0)
Source : La Croix - 08 novembre 2009
«L'Enfer», projet maudit d'Henri-Georges Clouzot
Serge Bromberg évoque dans un documentaire sidérant, l’histoire vraie d’un film hors norme qu’Henri-Georges Clouzot ne termina jamais
L’ENFER D’HENRI-GEORGES CLOUZOT de Serge Bromberg et Ruxandra Medrea *** Documentaire français, 1 h 34, en salles le 11 novembre
Cette histoire-là a commencé dans un ascenseur en panne. Serge Bromberg, Indiana Jones du 7e art, dénicheur de films rares ou anciens, sort de l’appartement d’Inès Clouzot. Il vient d’être éconduit par la seconde épouse du cinéaste décédé en 1977. Le bouillonnant patron de Lobster Films n’était pas le premier à la solliciter à propos d’une légende qui intrigue depuis plus de quarante ans les cinéphiles : les 185 bobines tournées par l’auteur des Diaboliques pour "L’Enfer", projet pharaonique, interrompu en plein tournage en 1964. L’un des plus grands «accidents» de l’histoire du cinéma français.
Les ascenseurs font parfois bien les choses et, après deux heures de discussion suspendue entre deux étages, Mme Clouzot accepte finalement de confier son trésor à ce passionné talentueux. Problème, si le scénario – l’histoire d’un jeune restaurateur, marié à une très jolie femme, jaloux jusqu’à la folie, dont Claude Chabrol a tourné sa propre version en 1994 – appartient bien à la veuve du cinéaste, les bobines, elles, sont la propriété de la compagnie d’assurances qui couvrit le «sinistre». Déposées aux archives nationales du film, elles sont juridiquement non consultables, ni divulgables. Qu’à cela ne tienne. Une médiation efficace parvient à mettre tout le monde d’accord.
L’incroyable aventure d'un film naufrage
Serge Bromberg peut enfin lancer son projecteur. Quinze heures de «rushs» l’attendent et autant de surprises : bouts de scènes tournées en extérieur, sur la terrasse d’un hôtel, en bordure de lac, sous le viaduc de Garabit (Cantal), expérimentations visuelles hypnotiques, fantasmatiques, sensuelles ou dérangeantes, jeux de lumière, de miroir, de formes, d’écrans, inversions de couleurs…
Au milieu de ce laboratoire, Romy Schneider telle qu’on ne l’a jamais vue, troublante, totalement investie, à 26 ans, dans cet étrange projet, dix ans après Sissi, deux ans après Le Procès d’Orson Welles. «Et je n’en revenais pas, s’enthousiasme Serge Bromberg. Les images étaient plus fortes que ce que la légende avait pu dire.»
Reconstituant étape par étape l’incroyable aventure de ce film naufrage, le documentariste et sa coréalisatrice, Ruxandra Medrea, ont mené l’enquête, recueilli le témoignage de Catherine Allégret, dont c’était le premier rôle, de Costa-Gavras, assistant réalisation, du réalisateur Bernard Stora, à l’époque stagiaire sur le tournage, mais aussi du compositeur Gilbert Amy, de l’ingénieur du son, et d’autres membres de l’équipe qui, chacun, apportent leur éclairage.
Pointilleux, inquiet, nerveux, obsessionnel
L’enfer, donc. Celui d’Henri-Georges Clouzot. Celui de la création, de ses recherches, de ses doutes intenables. Quelque temps auparavant, les producteurs d’un grand studio hollywoodien, la Columbia, avaient octroyé un budget illimité à Stanley Kubrick qui leur avait fait grâce d’un immense succès fondé sur une incroyable audace formelle : Docteur Folamour. En voyant les essais tournés par Henri-Georges Clouzot, les deux nababs croient à un nouveau miracle et lui ouvrent des lignes de crédit sans fixer aucun plafond.
Disposant de moyens infinis, le réalisateur, connu pour son perfectionnisme, veut-il, à 56 ans, écrire un nouveau chapitre du cinéma ? «Dix ans auparavant, il a filmé Picasso en train de peindre, rappelle Serge Bromberg. Il a été témoin de cette liberté incroyable dont jouit le maître devant sa toile.» Sauf qu’un film de cinéma répond à des règles que personne ne parvint à lui rappeler. «Clouzot a probablement été rendu fou par la palette de choix dont il disposait», estime Serge Bromberg.
Début juillet 1964, l’équipe de tournage s’installe à Garabit pour quatre semaines. En dépit d’une impressionnante logistique, le planning prend beaucoup de retard. Clouzot cherche toujours et encore, réveille ses collaborateurs à bout de nerfs à deux heures du matin, insiste pour que l’on travaille le dimanche. Certains s’échappent par la fenêtre des w-c lorsqu’il les appelle. Pointilleux, inquiet, nerveux, obsessionnel, le cinéaste effectue sans cesse de nouveaux repérages, de nouvelles expérimentations pour des scènes qui ne sont même pas dans le scénario ! "L’Enfer" ne verra jamais le jour
Le capitaine, éminemment respecté, sait-il où il va ? La tension monte avec les acteurs. Clouzot a une réputation de dur. Serge Reggiani ne compte pas s’en laisser conter mais souffre. Le réalisateur le fait courir derrière une caméra en travelling pendant des jours, l’épuise. Veut-il l’amener malgré lui vers un état psychique compatible avec son personnage ?
«C’est bien simple, Clouzot hurlait, Romy hurlait et Serge partait», se souvient un témoin. Jusqu’au jour où il ne revint pas… Au bout de deux semaines et demie, sourd aux menaces de procès, l’acteur quitte le plateau. Quelques jours plus tard, Clouzot a une crise cardiaque en filmant Romy Schneider sur le lac. Fin de partie.
L’Enfer ne verra jamais le jour. À quoi aurait-il ressemblé ? «On ne sait pas», glisse Serge Bromberg, qui a tout de même fait le pari audacieux – et réussi – de demander à des comédiens d’aujourd’hui, Bérénice Bejo et Jacques Gamblin, de lire quelques scènes du scénario, tendant un fil avec celles qui furent tournées à l’époque.
Il reste au spectateur des séquences incroyables et le récit saisissant, haletant, d’un échec extraordinaire, auquel Serge Bromberg et Ruxandra Medrea ont su donner une force universelle. En donnant accès à des images invisibles depuis quarante-cinq ans. En révélant une Romy Schneider inattendue. En rendant hommage, dans tous ses aspects artistiques, humains, historiques, à la tentative, à la fois sublime et désespérée, d’un démiurge qui faillit être emporté par son inatteignable vision.
Arnaud SCHWARTZ
07h08 dans Film-1964-Enfer, Presse - 2009 | Lien permanent | Commentaires (0)
Article intérieur : 4,5 pages |
- Source : Figaro.fr - 06 novembre 2009
Il était une fois Romy
Un incroyable documentaire exhume des images du film sulfureux et inachevé d'Henri-Georges Clouzot, «L'Enfer». L'héroïne en était Romy Schneider, dans son rôle le plus érotique. Flash-back sur une vie marquée par la grâce et le drame, les passions et les malentendus.
Romy, dans éL'important c'est d'aimeré, en actrice déclassée. Assise sur un type en sang, sadisée par une réalisatrice hystérique. Elle n'arrive pas à dire son texte, ce «Je t'aime» grotesque, impossible. Elle lève les yeux, implore un photographe joué par Fabio Testi : «Ne faites pas de photos, s'il vous plaît. Non, je suis une comédienne, vous savez. Je sais faire des trucs bien.» Le début du film d'Andrzej Zulawski nous revient toujours en flash, en écho. De ces mots fiers, suppliés, engorgés de chagrin et de fureur, filtre quelque chose d'incompris, d'inconsolable, de fatal, qui dépasse leur sens littéral. Car, en 1974, personne ne doute que Romy Schneider sache «faire des trucs bien». A 36 ans, c'est l'une des plus belles actrices du monde, des plus rigoureuses, des plus acharnées. Après avoir débuté à 15 ans dans le cinéma académique austro-allemand, elle s'est décollée de la guimauve de la trilogie des Sissi qui ont fait sa gloire adolescente pour tourner avec Otto Preminger, Orson Welles, Luchino Visconti, Claude Sautet. Ce n'est donc pas le cinéma qui inquiète Romy. Ni de se montrer nue, comme en témoignent les belles photos d'Eva Sereny ou de Giancarlo Botti. Plus loin dans le film, elle lâche «Je suis paumée» à un comédien désaxé joué par Klaus Kinski. Sur le tournage du chef-d'œuvre de Zulawski, qui lui vaudra le césar de la meilleure actrice, elle arrivait avec du champagne et du bordeaux dans un sac plastique et les partageait avec son partenaire Jacques Dutronc. Lors d'une prise, elle s'est écrasé le visage contre un mur de parking.
Elle est née Rosemarie Albach-Retty, en Autriche, à Vienne, le 23 septembre 1938, un an après le mariage de ses parents, Magda Schneider et Wolf Albach-Retty, deux gloires du cinéma allemand. L'enfant de la balle, très tôt surnommée Romy, a passé son enfance dans le chalet familial en Bavière, non loin de Berchtesgaden et duBerghof, le repaire d'Hitler. Magda Schneider plaisait à Hitler, au point d'être invitée au Nid d'aigle, comme on l'a vu récemment dans le documentaire Apocalypse. Les images montrent aussi la petite Romy jouant innocemment avec d'autres gosses au pied du chef nazi. Plus tard, elle soupçonnera Magda d'avoir couché avec Hitler.
Etrange jeunesse de Romy. Amputée d'un père parti avec l'actrice Trude Marlen. Cloîtrée dans un pensionnat. Flanquée d'une mère possessive qui rame pour retrouver des rôles après la chute du Reich. En 1953, pour ses débuts dans "Les Lilas blancs", d'Hans Deppe, Romy prend le nom de sa mère dans un film où Magda tient la vedette. Quand elle voudra se faire appeler Albach, il sera trop tard, le succès l'aura baptisée sous le nom maternel. Jusqu'en 1958, Magda apparaît souvent au générique des films de sa fille, notamment dans la série des "Sissi" d'Ernst Marischka, où elle joue la mère de l'héroïne. Romy sert la carrière de Magda, sous l'œil cupide d'un beau-père, Hans Blatzheim, qui aurait plusieurs fois tenté de coucher avec elle. La jeune actrice a donc des raisons d'étouffer, de ronger son frein.
Avec Delon, les rapports sont d'abord agressifs
De sous la très lourde perruque de Sissi dépassent des mèches rebelles. Elle déteste cette princesse sucrée aux antipodes de son caractère libre, foutraque, acide, déluré. Quand Pierre Gaspard-Huit lui propose "Christine", une adaptation de "Libelei", la pièce d'Arthur Schnitzler qui avait révélé sa mère, il semble que Romy n'en finisse jamais avec Magda. En fait, ce film va la libérer de sa famille, de l'Allemagne. Elle choisit sur photo son partenaire à l'écran : le jeune Alain Delon, qui vient l'attendre à sa descente d'avion à Paris. Au début, leurs rapports sont froids, agressifs, comme il sied aux félins. Ils s'apprivoisent vite. Magda sent le danger, elle aime l'ordre et Delon fait désordre, trop sulfureux. Romy s'en fout. Elle rejoint Delon en France.
Romy et Delon. «Les fiancés de l'Europe.» Des rôles en or dans la cage aux people. Mais ces deux-là sont trop viscéralement acteurs pour se la jouer dans la vie. Ils s'aiment comme on aime à 20 ans, bien et mal, mais comme on n'aime plus jamais ensuite. Sortant de Rocco et ses frères, Delon présente Romy à Visconti. Cadeau plus durable qu'une bague de fiançailles. Pour eux, l'aristocrate italien monte la pièce de John Ford, "Dommage qu'elle soit une p...". Romy retrouvera Visconti dans "Boccace 70 et "Ludwig ou le crépuscule des dieux". Un jour, elle nommera ses «quatre maîtres : Visconti, Welles, Sautet et Zulawski. Le plus grand est Visconti». Le couple se sépare en 1963. Delon a rencontré Nathalie, sa future femme. Il aurait écrit une lettre de rupture à Romy pendant qu'elle tournait à Hollywood, avant de lui laisser en guise d'adieu des fleurs, qu'elle aurait trouvées à son retour dans l'hôtel particulier qu'il avait déserté. D'après Delon, cette histoire de lettre et de bouquet est «complètement bidon». Façon de dire qu'en amour il n'y a ni bourreau, ni victime.
En 1964, débute le tournage de "L'Enfer", d'Henri-Georges Clouzot, avec Serge Reggiani. Un film sur la jalousie, inachevé et maudit, auquel Serge Bromberg et Ruxandra Medrea viennent de consacrer un passionnant documentaire. Les images retrouvées sont inouïes et révèlent le potentiel érotique d'une Romy fantasmée par les recherches en art cinétique du réalisateur. Elle vampe, allume, danse du ventre. On la voit même ligotée seins nus sur une voie ferrée. Sous le viaduc de Garabit, Clouzot s'enferre et déraille, tourne et retourne les mêmes scènes, se cogne un infarctus qui arrête les frais. Epuisé, Reggiani avait déjà quitté le tournage. A l'époque, Romy et Serge étaient très liés, elle débarquait souvent chez lui avec du whisky. Si l'actrice jouait en apnée, la femme tanguait, cherchait à s'arrimer. En 1966, elle se marie avec l'acteur et metteur en scène allemand Harry Haubenstock (dit Meyen), de quatorze ans son aîné. Leur fils David naît la même année. A Berlin, puis à Hambourg, Romy va jouer à l'épouse rangée, mais les crises couvent.
Delon est encore là, en ami. En 1968, il l'appelle pour jouer dans "La Piscine", de Jacques Deray, qui relance la carrière française de Romy. L'année suivante, c'est Les Choses de la vie, de Claude Sautet, avec Michel Piccoli. Sautet sait la regarder et parler d'elle : «Romy, c'est la vivacité même, une vivacité animale, avec des changements d'expression allant de l'agressivité la plus virile à la douceur la plus subtile.» Elle «dépasse le quotidien», prend «une dimension solaire». "César et Rosalie", "Max et les ferrailleurs", "Une histoire simple" feront d'elle le modèle de la femme française.
En Allemagne, elle est plutôt mal vue. Pour avoir signé en 1971, dans le magazine Stern, un manifeste féministe où elle reconnaissait avoir avorté, on la menace d'amende, de prison. On ne lui pardonne pas son exil ni qu'elle incarne une juive allemande fuyant les nazis dans "Le Train", de Pierre Granier-Deferre. En 1975, Romy retournera le couteau dans la plaie en jouant Clara dans "Le Vieux Fusil", de Robert Enrico. La scène du viol de Clara par les SS sera censurée outre-Rhin. En la tournant, l'actrice avait rageusement balancé un comédien dans l'escalier.
Au début des années 70, son mariage se désagrège. Elle sort avec le somptueux producteur américain Robert Evans, elle se passe du Jacques Dutronc en boucle, elle part au Maroc avec Bruno Ganz. Dans la ronde des liaisons erratiques surnagent des amitiés fortes.
Un rire qui saute au visage
Elle fête ses anniversaires avec le scénariste Pascal Jardin, prodigieux écrivain de La Guerre à neuf ans. Au bout du rouleau avec Meyen, elle divorce en 1975, et se remarie vite avec Daniel Biasini, son ancien secrétaire, de onze ans son cadet. Leur fille Sarah naîtra en 1977.
Sur nombre de photos, le rire de Romy saute au visage. Mais, comme le rappelle Emmanuel Bonini, l'un de ses biographes, en citant Romain Gary : «Le rire, c'est parfois une façon qu'a l'horreur de crever.» L'héroïne de "Clair de femme", adapté par Costa-Gavras, rira de moins en moins, et l'horreur sera complète. En 1979, Meyen se pend avec une écharpe blanche en Allemagne. Dans "L'important c'est d'aimer", le comédien germanique et désaxé incarné par Kinski portait une écharpe blanche. En 1980, à la cérémonie des Césars, elle critique cruellement Miou-Miou qui n'est pas venue chercher son trophée. Sur "La Banquière", de Francis Girod, elle affiche à la porte de sa caravane : «Entrée permise seulement à mes amis : Dany, Jean-Claude, Francis et quelques autres aussi, mais j'suis discrète et j'suis méfiante. Romy.» Elle jugule l'angoisse à grandes doses d'alcool et de médicaments. Son union avec Biasini, qui vient de coécrire Un mauvais fils, de Sautet, agonise. En juillet 1981 survient le drame ultime : son fils David, 14 ans, s'éventre en escaladant la grille de la maison des parents de Biasini et succombe peu après. Dévastée, Romy doit encore affronter les paparazzis. Chaque photo volée vole son âme. Mais elle a tant d'âme. Elle s'accroche au projet qu'elle a initié : "La Passante du Sans-Souci", un roman de Joseph Kessel, librement adapté par Jacques Rouffio. Elle y retrouve Michel Piccoli. C'est l'histoire d'une femme qui veut sauver son mari des nazis à Berlin et qui protège un enfant juif à Paris. L'enfant ressemble à David. Elle tourne au bout du chagrin. Cette prestation somnambulique, éblouissante, sera la dernière. On ne la verra pas dans le rôle qu'elle ambitionnait, celui d'Ulrike Meinhof, la terroriste allemande d'extrême gauche, compagne d'armes d'Andreas Baader.
La mort au bout du chagrin
«Qu'on me laisse enfin tranquille», c'est le message qu'elle adressera lors d'un entretien télévisé avec Michel Drucker où, vibrante et laminée, elle revient sur la profanation médiatique de David : «Qu'on se déguise en infirmier pour photographier un enfant mort... (...) Où est la morale ? Où est le tact ?» La morale et le tact conduiront le magistrat Laurent Davenas à ne pas ordonner d'autopsie le 29 mai 1982, quand Laurent Pétin, le dernier compagnon de Romy, aujourd'hui producteur, la retrouvera sans vie au petit matin dans l'appartement qu'ils partagent à Paris. Abus accidentel d'alcool et de médicaments ? Suicide ? Maladie ? Qu'importe. L'expression «mort naturelle» convient bien à celle qui semblait si lasse de vivre. Elle repose dans un cimetière des Yvelines. Sous le nom de Rosemarie Albach. Sur sa tombe, on aurait pu graver ces mots de Zulawski : «Elle payait de sa vie ce qu'elle montrait de beau à l'écran.»
Jean-Marc Parisis
21h50 dans Biographie, Presse - 2009, Revue Figaro | Lien permanent | Commentaires (2)
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Source : Le Figaro.fr - 06 novembre 2009
Serge Bromberg dévoile les mystères de cette œuvre inachevée, dans un ouvrage et un documentaire passionnants.
Les images inconnues de "L'Enfer", film inachevé d'Henri-Georges Clouzot, voient enfin le jour grâce à la passion et l'acharnement d'un homme qui en a tiré un livre magnifique, "Romy dans L'Enfer" et un documentaire palpitant, L'Enfer d'Henri-Georges Clouzot (sortie mercredi prochain, voir critique). En 2005, Serge Bromberg, producteur et restaurateur de longs-métrages, exhume les 185 boîtes de films invisibles depuis un demi-siècle, « bloquées » pour raisons juridiques et soigneusement conservées aux Archives françaises du film. Seulement quinze heures d'images muettes, non montées, à partir desquelles Bromberg a tenté de reconstituer l'histoire de cette œuvre énigmatique, qui a alimenté les fantasmes des cinéphiles. "L'Enfer", un tournage maudit interrompu au bout de trois semaines par l'infarctus de son réalisateur. Une aventure démesurée, dantesque, au budget illimité. Un rêve artistique qui a viré au cauchemar. «À trop vouloir s'approcher de la perfection formelle et de son rêve improbable, il s'y est brûlé les ailes», estime Serge Bromberg à propos de Clouzot.
Le réalisateur n'a alors pas tourné depuis quatre ans. Il sort d'une dépression, s'est retiré à Tahiti où il a débuté l'écriture de L'Enfer qui devra, selon lui, révolutionner le cinéma. Il propose à Romy Schneider, 26 ans et à Serge Reggiani, 42 ans, d'en devenir les héros. Romy Schneider veut montrer que Sissi est loin. Clouzot, séduit, réécrit pour elle la version finale de ce drame de la jalousie. Marcel Prieur (Serge Reggiani), patron d'un petit hôtel de province se demande si Odette (Romy Schneider), sa femme, ne l'a pas odieusement, scandaleusement, trompé. «Point de preuves : seulement des présomptions, mais terribles», écrit Clouzot.
La folie s'empare de Marcel. Clouzot veut filmer le cerveau malade de son héros. Mettre la paranoïa en image devient son obsession. Et puisque les producteurs de la Columbia lui ont offert un budget illimité, il en profite pour expérimenter différents procédés. Il met au point avec Éric Duvivier qui avait réalisé avec Henri Michaux Image du monde visionnaire, film illustrant des visions hallucinatoires sous mescaline un système d'éclairage particulier, l'Héliophore. Il se passionne pour les effets cinétiques, et demande à Joel Stein et Jean-Pierre Yvaral de collaborer avec lui. Pendant six mois, Clouzot tourne les essais préparatoires de "L'Enfer" dans le huis clos des Studios de Boulogne. Romy Schneider devient objet de fascination. Il la filme, des heures durant, le visage recouvert de paillettes et d'huile d'olive, ou bien peint avec un maquillage multicolore. Elle n'a jamais été aussi belle. Hypnotique, incandescente, érotique, sensuelle, elle se prête à tous les fantasmes, à tous les désirs cinématographiques de Clouzot. Son contrat précise qu'elle ne fera aucune scène dénudée. Pourtant elle accepte de tourner nue la séquence où, enchaînée aux rails de la voie ferrée, un train fonce sur elle.
Le tournage démarre en juillet 1964, à l'hôtel du Lac, au pied du viaduc de Garabit (Cantal). Clouzot est à la tête de trois équipes, véritable armée de cent cinquante techniciens. Mais le perfectionnisme du cinéaste, qui multiplie les prises, et le manque de coordination entre les troupes ralentissent considérablement le tournage. Tyrannique, insomniaque, il réveille ses techniciens pour parler du scénario, en réécrit les pages pour le lendemain. Les rapports avec Reggiani se détériorent. L'acteur, dépressif, est hospitalisé. On évoque la fièvre de Malte, transmise par le fromage de chèvre que Reggiani se fait livrer de Corse ! En fait, l'acteur n'a plus la force d'affronter le monstre sacré. Clouzot, usé, stressé, fait un infarctus. La production est temporairement interrompue. Les experts des assurances décident que le tournage ne reprendra jamais. L'Enfer aura coûté plus de 5 036 000 francs aux assurances. Clap de fin. Et début de la légende.
«Romy dans L'Enfer», texte de Serge Bromberg. Albin Michel-Lobster (25 €).
08h38 dans Film-1964-Enfer, Presse - 2009, Revue Figaro | Lien permanent | Commentaires (0)
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Source : L'express.fr - 29 octobre 2009
Les aventuriers du film perdu
Les collectionneurs de pellicule vivent une perpétuelle chasse au trésor. Avec ses bonheurs, ses déceptions, ses dangers. Enquête sur ces cinéphiles un peu cinglés à l'heure où l'un d'eux "reconstitue" "L'Enfer", oeuvre inachevée de Clouzot.
Le panneau est accroché à l'entrée de la boutique : "Si vous avez des films dans votre cave ou dans votre grenier, appelez-nous." Nous sommes au siège de Lobster, à Paris, société créée il y a vingt-quatre ans par Serge Bromberg, infatigable chasseur de pellicule, actuellement sous les feux de la rampe avec L'Enfer d'Henri-Georges Clouzot, un étonnant documentaire qu'il a réalisé à partir du film maudit et inachevé du réalisateur des Diaboliques (voir l' encadré). Mais l'homme ne s'affiche pas si souvent. Son vrai boulot, c'est de courir le monde à la recherche d'oeuvres qu'on croyait perdues. A ce jour, il possède 110 000 copies, longs et courts-métrages confondus.
Quand une cinémathèque cherche un film, c'est Serge Bromberg qu'elle appelle. Un jour, celle de Barcelone était en quête de L'Araignée d'or, de Segundo de Chomon, un muet espagnol de 1909. Serge Bromberg veut bien la céder, mais en échange d'une autre copie, pratique courante dans le milieu. ""A part Le Voyage dans la Lune, de Georges Méliès, en couleurs, on n'a rien", me répond mon interlocuteur. C'est comme dire à quelqu'un qui veut boire un coup : "A part une caisse de Petrus, je n'ai rien à te proposer"", raconte Serge Bromberg, qui n'en revient toujours pas d'avoir obtenu cette rareté.
Mais le ticket gagnant ne sort pas à tous les coups. Témoin, cet habitant de Vitry-le-François, dans la Marne, qui l'appelle pour se débarrasser d'un tas de pellicule. Sur place, Bromberg découvre, dans un recoin de grenier, une dizaine de boîtes : la quatrième bobine d'un film, la cinquième d'un autre... Depuis quinze ans, le propriétaire des lieux mettait chaque semaine une pile aux ordures parce que les éboueurs refusaient de tout prendre d'un coup. "J'ai soudain vu le fantôme d'un trésor disparu", se souvient Serge Bromberg, qui estime d'ailleurs la moitié du patrimoine cinématographique perdu à jamais.
Pourquoi ? Parce qu'en 1936 un cadre imbécile des Studios Universal convainc son patron du coût exorbitant du stockage des négatifs de films muets. Ils sont réduits en cendres. Parce qu'une comédienne, Janet Gaynor, revoit, au début des années 1970, un de ses vieux succès, Les Quatre Diables, de Friedrich Wilhelm Murnau (1928), et, ne s'y plaisant pas, jette l'unique copie dans l'océan. Parce que les films réalisés avant 1951, d'une extrême inflammabilité, ont brûlé par milliers dans des incendies, à Rome, à Mexico, à Tokyo ou en région parisienne.
Heureusement, les hommes comme Bromberg sont partout. Car la traque est planétaire. Qui se joue des frontières et des époques : Paris, Bruxelles, Rome, Los Angeles... Jusqu'aux pays de l'Est. Bien avant l'effondrement du bloc soviétique, des raretés circulaient déjà d'un côté du Mur à l'autre, vers l'Ouest, transitant le plus souvent par Belgrade. A chaque moment, sa figure : l'exploitant et distributeur néerlandais Jean Desmet (1875-1956), dont la collection de 900 titres est préservée depuis 1957 à Amsterdam ; l'abbé Joseph Joye, un Suisse, dont les 2 000 longs-métrages, acquis entre 1901 et 1911 pour être montrés à ses ouailles, reposent désormais à Londres ; le poète uruguayen Fernando Pereda, dont les bobines des années 1920, rapportées le plus souvent de ses séjours à Paris, sont sous bonne garde à Montevideo.
Autre lieu de référence : Bologne, en Italie. La cinémathèque locale, forte d'un fonds de 40.000 oeuvres, organise, depuis vingt-trois ans, le festival Le Cinéma retrouvé et dispose d'un laboratoire de restauration très perfectionné. Son directeur, Gian Luca Farinelli, a aussi coordonné, dans les années 1990, un service de recherche des films perdus. Ce projet, lancé en association avec un réseau international de cinémathèques, a abouti, en 2000, à la publication d'un rapport sur l'art de dénicher les films et de leur redonner vie. Ainsi, ce service a pu identifier environ 400 copies retrouvées plus ou moins complètes et a signalé un manque à l'appel de 500 titres, dont "L'Aigle de la montagne", d'Alfred Hitchcock (1926), ou On a volé un homme, de Max Ophüls (1933).
Où les trouver ? Comment ? Il n'y a évidemment pas de règles. Car tous les exemples sont dans les natures. Dans les années 1930, les forains projetaient des films un peu partout en France. Propriétaires des copies, ils les donnaient, une fois usées, à des paroisses, trop heureuses d'organiser des séances de cinéma les après-midi pluvieuses. Après quoi, les bobines finissaient entassées là où personne ne se serait pris les pieds dedans : sous le clocher de l'église. Des décennies plus tard, les chasseurs de pellicule écumeront toutes les églises afin d'enrichir leur collection. Ils partent également souvent en Europe de l'Est. Là-bas, les exploitants stockaient les copies dans un coin, transformant leur salle en caverne d'Ali Baba. C'est en Serbie que Serge Bromberg dénichera "Le Récif de corail", de Maurice Gleize (1939), un film jusque-là invisible, avec Jean Gabin, édité illico en DVD (MK 2).
Les salles françaises ne sont pas en reste. Quelques jours après la fermeture définitive, en 2002, du Kinopanorama, lieu mythique à Paris, un collectionneur y trouve trois copies 70 millimètres, dont une de La Chute de l'empire romain, d'Anthony Mann (1964). Lui n'est pas professionnel. Ni marchand, ni historien. Juste un dingue du Celluloïd, comme on en compte environ 1 000 en France. "Parmi eux, il y a beaucoup de dentistes, mais j'ignore pourquoi", précise Frédéric Rolland, auteur d'une thèse "Collections privées de films de cinéma en support argentique en France". Cinglé de pellicule lui-même, digne héritier de son grand-oncle et de ses 2 500 titres conservés dans une maison bourguignonne, Frédéric Rolland a réalisé son étude auprès de ses confrères après leur avoir promis l'anonymat. Les collectionneurs de films sont en effet une espèce menacée. Tout du moins inquiétée. Car la loi sur la possession de bobines reste floue. Ce qui n'empêche pas la justice de s'en mêler.
En 1995, Alain Gomet fut déclaré coupable de vendre des copies qui ne lui appartenaient pas et condamné à six mois de prison avec sursis. Ses 40 tonnes de pellicule ont été saisies. "Je demandais pourtant toujours l'accord des ayants droit, se défend Alain Gomet. Et, quand je retrouvais des films de catalogue, des maisons comme Gaumont étaient ravies." C'est également Christophe, fameux chanteur et cinéphile émérite, qui verra la police débarquer chez lui dès potron-minet pour réquisitionner 400 longs-métrages. "Ils m'ont embarqué comme un vulgaire receleur", raconte-t-il aujourd'hui. Il sera relâché, mais, pour les amateurs, le message est clair : la chasse est ouverte. Alors ils se cachent. Un dentiste parisien, dont le cabinet se transforme en cabine de projection le soir venu, nous demande, avant de raccrocher sans avoir rien dit, d'oublier son nom et son numéro de téléphone. L'obtention des bobines, quand elle se fait de particulier à particulier, est toujours entourée de mystère. "Ne jamais vendre, ne jamais acheter. Uniquement échanger. Et ne jamais demander la provenance", martèle Jacques, figure incontournable du milieu, qui préfère taire son nom pour garder ses 3 000 films, dont Les Aventures de Robin des Bois et Autant en emporte le vent. "Ces collectionneurs sont souvent ignorés, voire méprisés, mais sont pourtant essentiels, raconte Frédéric Rolland. Détenteurs de raretés, ils sont toujours disposés à les prêter gratuitement si un festival ou une cinémathèque le leur demande." Il n'empêche que, à l'heure du tout-numérique, collectionner de la pellicule peut sembler une hérésie. Voire un luxe. "Qui dit que, dans quinze ans, les fichiers numériques seront toujours compatibles ? demande Serge Bromberg. Pouvez-vous me citer un support autre que la pellicule qui ait duré aussi longtemps, à part les manuscrits de la mer Morte ?" De quoi motiver plusieurs générations de collectionneurs, qui, en 3009, retrouveront, peut-être, les copies perdues de la saga Indiana Jones.
21h21 dans Film-1964-Enfer, Presse - 2009 | Lien permanent | Commentaires (0)
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Source : Le Figaro.fr - 30 octobre 2009
Romy Schneider, la lumière et l'enfer
Elle n’aimait pas le mot «star»… Pourtant, vingt-sept ans après sa disparition, elle est devenue un mythe et la référence absolue des actrices. Quatre d’entre elles décryptent la légende Romy Schneider, au moment où L’Enfer, film inachevé de Clouzot, fait l’objet d’un documentaire.
par Sophie Grassain
En 1964, Romy Schneider croise le cinéaste Henri-Georges Clouzot, qui lui propose "L’Enfer", un drame névrotique sur la jalousie. Terrassé par un arrêt cardiaque, il ne terminera jamais le film. Serge Bromberg et Ruxandra Medrea font revivre ce tournage maudit grâce à L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot (voir la bande annonce à la fin de l’article), un documentaire balisé de témoignages et d’extraits où Bérénice Bejo et Jacques Gamblin lisent des scènes cruciales qui ne furent jamais filmées.
À l’époque, Clouzot y altère le son, y expérimente des images cinétiques et se noie dans sa quête esthétique. Pour lui, Romy est à la fois ange (l’épouse sage) et démon (dans les visions folles de son mari, Serge Reggiani, persuadé qu’elle le trompe). Mais surtout, elle accepte tout : faire du ski nautique pendant des jours, porter du rouge à lèvres bleu, se glisser nue sous un catafalque transparent.
Aujourd’hui, que reste-t-il d’elle ? Une plastique parfaite sanglée dans un maillot de bain noir (chez Deray). Des cheveux tirés en arrière qui lui donnaient le port de tête d’une écuyère (chez Sautet). Des personnages où les Françaises reconnaissaient des bribes de leur existence (Sautet, encore). Et cette façon de s’écorcher vive sur les arêtes de chaque rôle pour se dépasser (chez Zulawski). «Je n’ai peur de rien, sinon de moi-même », disait-elle.
Car elle souffrait. Elle souffrait de ce qu’elle croyait être ses limites. Mais aussi des abus d’une certaine presse avide d’intimité, qui n’hésita pas à la crucifier lorsque les choses de la vie (abus d’alcool et d’anxiolytiques, mort tragique de son fils David) la rattrapèrent. L’actrice s’est grandie devant nous. Elle s’est rebellée devant nous. Elle y a tout perdu. Elle y a tout gagné, et, d’abord, une part d’éternité.
Romy vu par...
ISABELLE CARRÉ
«Je l’ai découverte dans Une femme à sa fenêtre (de Granier-Deferre). J’ai tout de suite attrapé un stylo et noté ses répliques. Un geste irrationnel : je voulais garder une trace d’elle. Je l’ai revue dans L’Important, c’est d’aimer (de Zulawski) et… je me suis acheté tous ses films. César et Rosalie (de Sautet) me fascinait. J’ai appris la lettre de Rosalie à David et passé mes castings grâce à elle. C’était mon petit joker. Je la reprogramme encore sur mon iPod pour me donner de l’énergie. Romy Schneider est l’actrice à vif, l’actrice de l’émotion à fleur de peau. Personne ne s’est exposé autant qu’elle. Elle n’a pas voulu rester une petite Agnès de L’École des femmes que sa beauté enfermerait. Chaque soir, sur le tournage de La Mort en direct, elle glissait à Bertrand Tavernier des lettres sous sa porte. Ce fourmillement de mots, écrits dans tous les sens, disait sa fébrilité chargée de doutes, son enthousiasme et sa reconnaissance.»
SANDRINE KIBERLAIN
«Deux actrices me bouleversent : Ingrid Bergman, dont la froideur m’énervait, mais dont j’ai fini par devenir folle ; et Romy Schneider, qui ne mettait aucune distance entre sa douleur et celle de ses personnages. Elle me choquait presque par l’intensité de ce qu’elle montrait d’elle à l’écran, notamment dans L’Important, c’est d’aimer. Peut-être est-elle, d’ailleurs, morte de ça, elle qui a subi tant d’épreuves. Moi, je ne me réfère pas aux miennes. Je n’ai, par exemple, jamais pensé à la mort de mon père pour jouer un immense chagrin, car il me semble que je sortirais aussitôt du film et du rôle. J’adorais ses gestes. Sa manière de trimbaler une écharpe… Toute autre qu’elle se serait empêtrée. Cette vérité, sensible jusque dans sa façon de bouger. Et dans les films de Sautet, où elle personnifiait la femme libre. Romy Schneider remplissait l’image. Depuis, je cherche quelqu’un qui, comme elle, la remplisse.»
BÉRÉNICE BEJO
«Un matin, j’ai reçu une lettre : les réalisateurs de L’Enfer me proposaient de lire des séquences du scénario de Clouzot. J’ai tout de suite posé mes conditions : il n’y aurait aucune mise en scène, je tiendrais toujours le scénario en main et je ne jouerais pas. Il était hors de question que l’on me compare à Romy. Je ne voulais pas risquer que les spectateurs se demandent : mais comment ose-t-elle ? J’ai aussi travaillé ma voix pour la rendre le plus humble possible. Dans L’Enfer, Romy Schneider, 26 ans, était dans la vie. Elle faisait des grimaces lors des essais costumes (muets), et si on lit sur ses lèvres, on se rend compte qu’elle soupire parfois : “J’en ai marre.” Elle avait quelque chose d’incroyablement sexy. Regardez-la faire rebondir ce petit gadget en forme de spirale sur son corps nu. Si Romy m’inspire, c’est qu’elle incarne l’abandon. Elle se situe à la hauteur d’une Gena Rowlands.»
AUDREY DANA
«Elle avait un grand front, elle n’était pas la fille la mieux "gaulée" de la terre, mais sa beauté coupait le souffle. Son investissement et son énergie brute en faisaient surtout une actrice rare que je comparerais à Cate Blanchett. La vie tourmentée de Romy, qui a traversé l’impensable, entretenait une forte résonance avec ses personnages. Elle renvoie donc souvent un sentiment de mise en danger. Quand ma vie a basculé avec Roman de gare (de Lelouch), on m’interrogeait : "Que voudriez-vous faire désormais ?". Je répondais : "Tourner dans le biopic sur Romy Schneider". En 2008, j’ai obtenu le prix Romy-Schneider. Elle aimait les rôles qui n’étaient pas gagnés d’avance. Son exigence, qu’elle vivait comme une souffrance, me guide. C’est le carburant de ceux qui avancent.»
Romy en résonances
EMMANUELLE BÉART, L’HÉRITIÈRE : Claude Chabrol la choisit pour L’Enfer, inspiré du film inachevé d’Henri-Georges Clouzot ; Claude Sautet, pour Un cœur en hiver. Deux films hantés par Romy Schneider.
SARAH BIASINI, LA FILLE : elle l’est dans la vie. Sur scène dans la pièce "Pieds nus dans le parc", de Neil Simon, où, des pommettes (un peu plus prononcées) jusqu’à la bouche, elle ressuscite les traits de sa mère.
ROXANE MESQUIDA, LA PETITE SŒUR : Benoît Jacquot (L’École de la chair) et Catherine Breillat (À ma soeur) ont vu en elle la femme fatale derrière l’ingénue. Un parcours proche de celui de Romy.
GÉRALDINE PAILHAS, LA GRANDE SŒUR : François Ozon, qui adorait Romy, l’a dirigée dans 5 fois 2. Cheveux tirés, beauté pure, sans fard, la filiation est évidente.
LAURA SMET, LA PETITE COUSINE : un visage de fauve au repos et un rôle dans UV, de Gilles Paquet-Brenner, qui rappelle à la fois La Piscine, de Jacques Deray, et Plein Soleil, de René Clément.
09h51 dans Film-1964-Enfer, Presse - 2009, Revue Figaro | Lien permanent | Commentaires (2)
Source : Paris-match.com - 20 octobre 2009
Elle avait 25 ans. Henri-Georges Clouzot l’avait choisie comme héroïne pour «L’enfer» dont le thème est la jalousie. Un film maudit qu’un documentaire et un livre ressuscitent aujourd’hui.
«Clouzot voulait la bouche de Romy en gros plan, raconte la scripte, Nguyen Thi Lan. On a d’abord filmé la langue qui tournait autour de la bouche et ce n’était jamais parfait... J’ai l’impression que nous avons passé une journée complète sur sa bouche, peut-être plus. Et Romy s’énervait, elle ne comprenait pas. Après avoir tourné avec tant de soin les “Sissi”, elle se retrouvait maintenant à faire tourner sa langue autour de sa bouche à n’en plus finir.»
Le film est baptisé «L'enfer», un titre prémonitoire
Début de l’année 1964. Henri-Georges Clouzot s’apprête à révolutionner le cinéma avec un dix-septième long-métrage annoncé comme un événement et qui bénéficie du soutien des producteurs américains de la Columbia. Au vu des premiers rushs qu’ils jugent «hypnotiques, incandescents, époustouflants», ils vont prendre la décision rarissime d’allouer à Clouzot un budget illimité. Changement de standing pour le réalisateur qui abandonne son petit bureau. Georges, comme l’appellent ses intimes, s’installe dans une suite au... George V, justement, où son projet délirant va prendre corps. Le film est baptisé «L’enfer». Un titre prémonitoire.
Romy Schneider, 25 ans, vingt-cinq films, en est la vedette féminine. Elle rentre des Etats-Unis où elle s’était exilée après sa rupture avec Alain Delon. Elle vient d’y tourner sous la direction d’Otto Preminger. Elle est déjà une star. Mais pour Georges, elle est prête à tout. N’est-il pas le réalisateur du «Corbeau», de «L’assassin habite au 21», de «Quai des Orfèvres», du «Salaire de la peur» et des «Diaboliques» ? Ne pourrait-il devenir, à l’issue de cette expérience, son Hitchcock à elle ? Pour Clouzot, justement, la fascination que suscite Romy s’inscrit au cœur même du film. Elle sera un sujet d’obsession et de paranoïa idéal.
Passé maître dans l’art de distiller l’angoisse, Henri-Georges Clouzot veut, cette fois, aller beaucoup plus loin, toucher du doigt une forme de paroxysme. Son obsession ? L’obsession. Il sort d’une grave dépression, après la maladie et la mort de Véra, son épouse et égérie. «Pas une dépression de starlette, dit-il, une vraie.» Il veut mettre en images les malaises anxieux qui l’empêchent de dormir. Tout cela va se cristalliser autour du thème de la jalousie. Mais comment faire vivre la terrifiante névrose morbide d’un mari tourmenté, en l’occurrence Serge Reggiani, afin que chaque spectateur la ressente intimement ?
Au cours de la préparation du film, la jalousie est répertoriée en dizaines de fiches multicolores. Chaque couleur correspond à un état d’âme, un moment, une situation. Une tentative de mise en équation de la folie. Un jeu dangereux. «Il pensait sûrement qu’on n’avait jamais traité la jalousie comme il le fallait, explique Catherine Allégret, qui fait partie du casting. Lui, il est allé dans le gras de la douleur.»
«L’enfer» commence donc sur une histoire banale de jalousie. La vie quotidienne sera tournée en noir et blanc, les fantasmes infernaux du mari s’inscriront en couleur. Banale histoire, en fait, oui. Sauf que la manière de la raconter ne doit pas l’être. Et, à cause de cela, «L’enfer» va devenir un véritable enfer. Il y a d’abord les essais. Ils vont durer plusieurs semaines et laisser tout le monde exsangue, Clouzot et son cœur affaibli en premier. «Lors de ces essais, je me rendis compte qu’il était le metteur en scène le plus difficile que j’aie jamais rencontré, confiera Romy Schneider. Difficile, mais pas dans un sens négatif ! Cet homme ne se disait jamais satisfait, c’était un perfectionniste qui voulait que chaque ton, chaque éclairage, chaque geste soit exactement, à la plus petite nuance près, tel qu’il se l’était imaginé auparavant. Je me demandais : “Comment supporteras-tu dix-huit semaines de tournage avec lui ?”»
On disait de Clouzot qu'il était cynique, impitoyable
Romy a rapidement conscience de s’être embarquée dans une entreprise de doux dingue, dans une histoire dont elle ne parvient pas à deviner si elle en est la victime ou le bourreau aguicheur et pervers. Une Sissi ultra-sexy qui tromperait son mari avec des hommes et des femmes. Mais Romy croit encore au génie du maître, qui tente de la pousser au bout d’elle-même. Costa-Gavras, premier assistant sur la préparation du film, se souvient : «Depuis des années déjà, les acteurs entraient sur le plateau de Clouzot les poings serrés, car il avait la réputation d’être extrêmement dur avec eux. On le disait cynique, impitoyable... Cela faisait partie de son image de marque.»
De son côté, pourtant, le metteur en scène travaille comme un forcené. Il a engagé les meilleurs techniciens de l’époque et constitué trois équipes de tournage qui forment une véritable armée. Il fait plancher Boulez et l’Ircam sur la bande-son, utilise l’iconographie de l’art cinétique angoissant, dérangeant, multiplie les effets spéciaux, tente toutes les expériences. Et Romy subit tous les supplices. Elle est enduite d’huile d’olive et recouverte de paillettes, grimée de fards multicolores. Une roue de 8 mètres de diamètre, sur laquelle sont placés plusieurs projecteurs et des filtres de couleur, tourne en permanence, l’aveugle par moments. Elle se protège les yeux, souffre. L’épreuve est à la limite du supportable. Et pourtant, comme toujours, elle prend ces essais extrêmement au sérieux, même si elle ne parvient pas à perdre son accent, comme Clouzot le lui demande avec insistance depuis des semaines.
Pire, elle acceptera de tourner nue, alors que son contrat habituel l’interdit, dans une scène d’un érotisme et d’une violence inouïs – elle est attachée sur des rails de chemin de fer –, qui ne figure même pas dans le scénario. Dans le documentaire de Serge Bromberg, qui permet de la découvrir sublime et tourmentée au cours de ce marathon surréaliste, on lit parfois sur ses lèvres l’agacement et l’énervement total : « Oh, s’il te plaît, Georges ! J’en ai marre ! » Nguyen Thi Lan confirme : «J’ai vu partir Romy sur des coups de colère, disant : “Non, je ne veux pas faire ça. Tu m’emmerdes, je l’ai déjà fait !” Elle quittait le plateau et rentrait dans sa loge en hurlant : “Je ne veux plus te voir !” C’étaient des scènes assez démentielles.»
Le premier à craquer est Serge Reggiani
Clouzot est certainement en train d’inventer le cinéma de demain, les images conservées en témoignent, mais la troupe a beaucoup de mal à suivre. Il refait cinquante fois les mêmes prises, paraît être le seul à comprendre où il va. Le tournage patine, s’enlise. Le réalisateur, insomniaque, a pris l’habitude de réveiller ses plus proches collaborateurs en pleine nuit. Il les épuise, ne supporte pas qu’on s’arrête de travailler le dimanche. Le premier à craquer est Serge Reggiani. On diagnostique une fièvre de Malte. Maladie diplomatique ? Dépression ? L’acteur, en réalité, n’en peut plus de s’opposer à Clouzot. Il quitte le plateau, définitivement.
Jean-Louis Trintignant est appelé à la rescousse, mais il ne reste que quelques jours. Le tournage se poursuit, sous haute tension, jusqu’à cette journée torride de juillet, un peu moins de trois semaines après le premier clap. Romy Schneider et Dany Carrel ont pris place dans une barque, chemisiers largement ouverts. On filme, loin des regards, une scène érotique entre les deux actrices, pour laquelle elles vont devoir s’embrasser pendant des heures. A l’arrière de l’embarcation, Clouzot tire sur sa pipe, comme d’habitude. William Lubtchansky, assistant opérateur à l’époque, raconte : «D’un seul coup, plein de gens se sont précipités. Clouzot venait de faire un infarctus. Les ambulances sont arrivées et on l’a emporté à l’hôpital. Cela a été très rapide et la production a tout de suite pris les choses en main.» Le tournage est arrêté.
Personne n’ira jusqu’au bout de «L’enfer», même pas Clouzot qui survit par miracle à l’accident cardiaque. Tout le monde est sous le choc et le restera longtemps. Quelques années plus tard, Romy Schneider confiera à Costa-Gavras, qui la questionne : «Non, on ne parle pas de cela. “L’enfer”, c’étaient des moments exceptionnels, mais des moments un peu difficiles aussi.»
Chez Clouzot, qui ne tournera par la suite qu’un seul film et quelques documentaires avec Herbert Von Karajan, la blessure ne s’est pas refermée non plus. Sa femme, Inès, qui a permis que ce voyage au bout de «L’enfer» soit visible par tous, raconte sa fin, le 12 janvier 1977. «Il est mort dans notre salon en écoutant “La damnation de Faust”, de Berlioz. La partition, qu’il suivait continuellement, était ouverte sur la table basse à la page de la scène XV. Marguerite, l’héroïne de cette légende dramatique, était en train de chanter ces vers : “Tout me paraît en deuil/Alors ma pauvre tête/Se dérange bientôt/Mon faible cœur s’arrête/Puis se glace aussitôt.”»
«L'enfer, d'Henri-Georges Clouzot» de Serge Bromberg, sortie en salles le 11 novembre.
par Ghislain Loustalot - Paris Match
Retrouvez dans notre magazine Paris Match, en vente partout en France, les photos exclusives de Romy Schneider, le moment où, pour la première fois, elle a jouée nue devant la caméra de Henri-Georges Clouzot. Retrouvez également notre diaporama exclusif ParisMatch.com sur le film maudit et ressuscité.
10h10 dans Film-1964-Enfer, Presse - 2009, Revue Paris Match | Lien permanent | Commentaires (0)
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Source : Quality - 16 octobre 2009
Ein Gespür für ROMY
1964 traf Will McBride auf Romy Schneider. Die Bilder, die damals entstanden, gelten als Meisterwerke. Nun holte der legendäre Fotograf noch einmal eine junge Schauspielerin vor die Kamera: Jessica Schwarz - die demnächst als Romy in einer Verfilmung glänzt
von Rüdiger Sturm
Dass er selbst und sein legendäres Shooting mit Romy Schneider, damals 1964 in Paris, in dem neuen Film eine Rolle spielen wird, erfährt will McBride erst am Fotoset von Jessica Schwarz, die die große deutsch-österreichische Schauspielerin verkörpert. "Dabei war das eigentlich eine ziemlich unspektakuläre Sache", erzählt die Fotografenlegende mit dem unverkennbaren amerikanischen Akzent über die sagenumwobene Begegnung. „Ich war gerade zufällig in Paris, als die Redaktion von twen anrief und mich dahinschickte. Ich hatte von dieser Romy Schneider noch nie etwas gehört, kam in das Hotel, wo ein ganzer Tisch mit Alkoholflaschen stand und wir verköstigten die alle erst einmal. Dann ging es ganz schnell, sie war unglaublich vor der Kamera, spielte unentwegt. Das war vermutlich das Markanteste an ihr, wie auch ihr enger Freund Roger Fritz immer betonte - sie spielte unentwegt, ihr ganzes Leben lang." Jessica Schwarz, die aufgrund dieses Gefühls, mit dem wirklichen Leben Romy Schneiders durch das Fotoshooting in Verbindung zu treten, etwas aufgeregt war, bewies hingegen große Natürlichkeit. "Sie ist überhaupt nicht so wie Romy", sagt Will McBride. "Und gerade das macht sie sehr sympathisch." Wie auch die Tatsache, dass Jessica Schwarz trotz eines verletzten Knies, den Fototermin tapfer durchstand.
Was haben Sie mit Ihrem Knie angestellt ?
Meine Katze ist in der Nacht abgehauen und der bin ich hinterher gejagt. Leider war da eine Kette im Weg, die man in der Dunkelheit nicht so gut sehen konnte. So bin ich aufs Knie gefallen und dann habe ich es auch noch bei einem Fotoshooting zu stark strapaziert. Ich habe jetzt endlich einen Arzttermin gemacht.
Sind Sie hart im Nehmen ?
Ja, das würde ich schon so sagen. Dabei würde ich durchaus gerne mal zimperlich sein, aber ich bin eben zu diszipliniert und pflichtbewusst in meinem Beruf. Da sage ich mir : Weg mit den kleinen Luxusproblemchen, es geht eben um die Arbeit. Als ich zum Beispiel den Mystery-Thriller "Die Tür" drehte, da hatte ich bei den Drehbuchbesprechungen 40 Grad Fieber und trotzdem habe ich mich irgendwie durchgebissen.
Kann es nicht sein, dass Sie sich manchmal zu viel zumuten ? Ein so komplexes Projekt wie "Romy" schreit ja geradezu nach Selbstentäußerung.
Ich gebe zu, dass mich dieser Dreh schon schwer gebeutelt hat. - Das fing mit dem kleinen Detail an, dass Romy Schneider eine starke Raucherin war. Ich rauche ja selbst, aber durch die Wiederholungen einzelner Einstellungen bin ich am Tag auf sieben Schachteln gekommen. Das war mir dann doch etwas zu viel, ich dachte schon ans Aufhören. Aber das wirklich Aufreibende war, dass ich mich über ein Jahr fast ständig mit ihr beschäftigt habe. Es gab Tage, wo ich sie nicht ertragen konnte. Und am Schluss war ich schon froh, wieder in mein eigenes Universum schlüpfen zu können. Andererseits hat mir diese Erfahrung auch sehr viel Erfüllung gebracht. Ich möchte sie um nichts in der Welt missen. Ein Stück von Romy Schneider ist auch jetzt noch in mir drin.
Was verbindet Sie mit Romy Schneider ?
Schon allein die Leidenschaft für die Arbeit. Und ich weiß auch, wie schwer es ist, als Frau alles unter einen Hut zu bringen - den Wunsch nach totaler Liebe, nach Familie und Geborgenheit einerseits und die Herausforderung seines Berufs andererseits. Da kann man eben manchmal scheitern. Es gibt auch insofern gewisse Parallelen, als sie nicht gerade mit künstlerisch anspruchsvollen Projekten angefangen hat. Wer konnte ahnen, dass sie nach "Sissi" Filme wie "Trio Infernal" drehen würde? Ich will mich keinesfalls mit ihr vergleichen, aber ich habe das nach meiner Zeit als "Viva"-Moderatorin ähnlich erlebt. Ich hatte keine wirkliche Ausbildung und Technik, sondern musste mich auf meine Intuition und mein Bauchgefühl verlassen. Gegenüber Kollegen, die das richtig gelernt haben, hatte ich Riesenrespekt.
War die Schneider früher ein Vorbild für Sie ?
Ich hatte sie schon bewundert, als ich nicht im Entfernsten an die Schauspielerei dachte. Als Mädchen spielte ich mit meinen Freundinnen Sissi : Wir zogen uns Bettücher über, schmückten uns mit Gürteln und Blumen und wandelten so durch den Garten. Ich mochte auch "Monpti" oder "Mädchen in Uniform", wo man schon ihre ganze Energie spüren konnte, und in "Swimming Pool" hat mich ihre Präsenz regelrecht umgehauen. Als ich dann in meinem Beruf anfing, schaute ich mir gezielt Filme mit ihr an, um zu lernen - ob "Dinge des Lebens" oder "Der Prozess". Ich fand sie auch deshalb so überwältigend, weil man durch ihre Schönheit ihren ganzen Schmerz erkennen konnte.
Wie viel Schmerz braucht man, um gut spielen zu können ?
Als Künstler musst du schon auch für die Traurigkeit und die dunklen Seiten des Lebens offen sein. Du solltest nur aufpassen, dass du nicht unter die Räder kommst. Nach der Erfahrung von "Romy" bin ich absoluter geworden, ich springe mit einer neuen Leidenschaft in die Rollen hinein, aber ich versuche dabei auch innerlich stabil zu bleiben. Ich würde mich wahrscheinlich nicht mit voller Wucht gegen eine Wand werfen und mich dabei verletzen, wie sie das getan hat. Da hilft mir zum Glück, dass ich eine wesentlich bodenständigere Person bin.
Woher kommt das ? Von Ihrem Elternhaus ?
Ich denke schon. Meine Eltern waren immer um mich herum, schon allein weil sie einen gastronomischen Betrieb neben unserem Elternhaus hatten. Da konnte ich immer mit ihen sprechen, wenn mich etwas bewegt hat. Das ist auch heute noch so.
Aber als Jugendliche will man sich doch von seinen Eltern abnabeln. Sie selbst zogen ja mit 16 aus, um Karriere als Model zu machen.
Ich sage ja auch nicht, dass es keine Reibungen gab. Aber meine Eltern hatten immer sehr viel Verständnis für mich, selbst wenn ich das vielleicht früher nicht so wahrgenommen habe. Und die Harmonie der Familie gibt mir sehr viel Stabilität. Deshalb kehre ich ja, wenn ich wieder Normalität und Bürgerlichkeit brauche, in meine Heimatstadt Michelstadt zurück. Dann sitzen wir zusammen und sprechen über alles, was uns bewegt.
Was passiert, wenn Sie einen Partner haben? Wird der von der Familie überprüft ?
Momentan stellt sich die Frage nicht, aber meinen Partner bringe ich schon nach Hause mit. Ich sage aber auch vorauswarnend : "Schaut ihn euch an, aber ich will keinen Kommentar. Lasst mich das selbst herausfinden und beeinflusst mich nicht direkt."
15h34 dans Films-Romy, Presse - 2009 | Lien permanent | Commentaires (0)
NDLR : Eh oui... Un article sur Romy... 10 pages... On pourrait se réjouir !! Mais non... Car si vous y regardez de plus près, vous verrez qu'il s'agit exactement du même article paru dans "Célébrité Magazine" de mai 2009... Une honte ? Oui ! Article intérieur : 10 pages |
01h25 dans Presse - 2009 | Lien permanent | Commentaires (3)
NDLR : il semble que le magazine "Doggy Mag" soit reparti au numéro 1 avec un nouveau nom... Cliquez ici pour visiter le site internet de Doggy Mag Retrouvez votre nouveau magazine people, Doggy Célébrités, avec Laure Manaudou, Patrick Sabatier, B.B., Romy Schneider, Michel Drucker, Xavier Bertrand et Richard Anconina, dans les kiosques et chez les marchands de journaux dès le 31 août 2009. Dans ce numéro, jouez et gagnez aussi des bijoux griffés Alain Delon et découvrez les shopping de Christian Audigier et de Clara Morgane... [...] Article intérieur : 2 pages |
00h18 dans Presse - 2009 | Lien permanent | Commentaires (2)